Emilie BRAY nous partage son expérience de 15 jours de vélo sur la Ciclovia Francigena au départ de Massa jusqu’à Rome. Un séjour qui prolonge son séjour en vélo entre Ivrea et Milan :
Informations pour préparer un voyage à vélo sur la CicloVia
Date du voyage
Du 17 avril au 1er mai 2022
Quand partir
Pour découvrir les régions du centre de l’Italie, le printemps et l’automne sont les saisons idéales. Au début du printemps, on s’expose davantage à la pluie. Il faut juste le savoir avant de partir afin de se préparer en conséquence. En termes de météo, en effet, nous avons rencontré presque toutes les situations possibles : fraîcheur, douceur, chaleur, vents forts, pluies diluviennes, petites averses, beau ciel bleu, etc.
Lieu
Italie, Toscane et Latium
Comment se rendre sur la traversée de la Toscane en vélo
Nous sommes allés à Massa en voiture. De Grenoble, cela représente un peu plus de 500 km et 6h de route. J’aurais aimé y aller en train, mais c’était beaucoup trop compliqué : il aurait fallu faire 4 changements pour arriver à bon port. J’ai choisi la ville de Massa comme point de départ de notre voyage car, en plus d’être un point de passage de la Via Francigena, c’est une ville avec une gare de train. Ainsi, arrivées à Rome, nous avons pu rejoindre notre point de départ en 6 heures de train avec un seul changement à Pise. Pratique !
Participantes
Marine : curieuse, enthousiaste, aimant les challenges sportifs. Signe particulier : elle s’est découvert une passion pour la langue italienne au cours du voyage ! Beh, certo !
Mathilde : joviale, écolo, épicurienne. Signes particuliers : elle trimballe des numéros de Télérama dans ses sacoches (bah quoi ?) et utilise les papiers gras emballant les focacie pour faire la vaisselle, sans eau, au bivouac. Et bizarrement, c’est efficace !
Bérengère : artiste, bavarde, toujours de bonne humeur, excellente cuisinière, fondue de glaces. Signe particulier : elle avale les côtes italiennes à 15% aussi facilement que si elle pédalait le long de la Loire à vélo !
Emilie : voyageuse dans l’âme, aimant être dehors sur un vélo, sous une voile de parapente, ou bien encore dans un canoë… et toujours motivée pour aller en Italie. Signe particulier : elle carbure aux noisettes du Piémont.
Où dormir ?
L’itinéraire de la Via Francigena, de Massa à Rome, traverse la Toscane et le Latium. Ces régions sont touristiques et proposent une multitude de possibilités d’hébergement. Les fins d’étape se trouvant souvent dans des villages ou des villes, nous avons principalement dormi « en dur ». Toutefois, nous avons choisi de transporter dans nos sacoches à vélo tout le matériel nécessaire au bivouac car il me tenait à cœur de passer quelques nuits dehors. Sur cet itinéraire particulier, il est possible de dormir dans des hébergements dédiés aux pèlerins pour des sommes dérisoires.
Où se restaurer/se réapprovisionner ?
Impossible de dresser la liste exhaustive de tous les endroits où l’on peut manger sur le parcours. Retenez simplement qu’en Italie, cela ne pose aucun problème car on traverse sans cesse des petits villages dans lesquels on trouve toujours au moins une épicerie. Nous faisions donc de petites courses chaque jour et on n’a jamais manqué de rien.
Office du tourisme
Office de tourisme de Toscane
Caractéristiques de la région
La Toscane est une province du centre de l’Italie. C’est une grande région, bien connue pour ses vignobles, ses paysages de collines bordées de cyprès et son patrimoine culturel exceptionnel.
Le Latium se situe au sud de la Toscane. Toscane et Latium sont les dernières provinces italiennes traversées par la Via Francigena, itinéraire formé par un réseau de routes et de chemins empruntés par les pèlerins de France et d’Angleterre depuis le Moyen-Age pour se rendre à Rome.
Alors que c’est une coquille qui permet d’identifier le chemin de Compostelle, c’est la figure d’un pèlerin, baluchon sur l’épaule et bâton en main qui est associé à la Via Francigena. Le parcours est balisé en blanc et rouge comme tous les chemins de grande randonnée. Un parcours cyclable de plus de 1000 km, la CicloVia Francigena, permet également de tracer la route, cette fois-ci du col du Grand Saint Bernard à Rome. C’est cet itinéraire, balisé en bleu et blanc, que nous avons suivi.
Quoi d’autre dans la région
Retrouvez un autre récit d’expérience de voyage à vélo sur la CicloVia Francigena.
Également, vous pourrez vous adonner au trekking en Italie. Retrouvez un récit de voyage sur la traversée des Alpes de Salzbourg à Venise.
Bibliographie/Cartographie
L’itinéraire courant sur plus de 500 kilomètres, je n’ai pas pris de carte topographique papier. En revanche, j’ai utilisé l’application dédiée à la Via Francigena. Elle permet d’accéder à toutes les informations nécessaires pour suivre le chemin : cartographie, liste d’hébergements, points d’intérêt… Bien que l’itinéraire soit globalement bien balisé, l’application dédiée avec le tracé GPS de l’itinéraire nous a sauvées plus d’une fois ! Je conseille vivement de la télécharger avant de se lancer sur le parcours, elle est très utile.
Liens internet
Pour avoir le point de vue d’un couple de voyageurs italiens ayant parcouru une partie de la Via Francigena à pied (attention, site uniquement en italien)
Pour s’évader sur le blog d’un couple franco-italien en vadrouille à vélo autour du monde
Voyage à vélo sur la CicloVia Francigena de Massa à Rome
Genèse du voyage
C’est mon troisième voyage sur la Via Francigena. La dernière fois, je l’ai laissée à Pavie. A partir de là, l’itinéraire oblique vers le sud, quittant la Lombardie pour la province de l’Emilie- Romagne. Cette année, je décide d’en finir avec l’itinéraire et d’aller jusqu’à Rome. En me penchant sur les distances et les dénivelés, je m’aperçois qu’il sera difficile de rallier Rome depuis Pavie en 15 jours, à moins de faire des étapes vraiment très sportives. Je choisis donc de partir du nord de la Toscane, d’une ville côtière dénommée Massa. De là, 500 kilomètres et 5000 mètres de dénivelés nous attendent (chiffres non contractuels, on verra pourquoi plus tard dans le récit), soit 50 km et 500 mètres de dénivelés par jour en moyenne pour 10 jours effectifs sur le vélo. Cela laisse 3 jours de visite en chemin et 2 jours de voyage pour aller et revenir d’Italie.
Nouvelle équipe
Changement d’équipe aussi : Annik et Patrick ne m’accompagnent pas cette année. Le terrain vallonné de ce voyage ne convient pas à Annik qui déteste tout autant les montées que les descentes. Là, clairement, à partir de Pavie jusqu’à Rome, à l’exception de quelques courts tronçons, ce n’est qu’une succession de montées et de descentes jusqu’aux fameuses collines de Rome. Cette année, je m’entoure de 3 amies surmotivées : Marine, Mathilde et Bérengère, toutes 3 amoureuses des voyages à vélo. Autant vous le dire tout de suite, j’ai adoré ce voyage sur la Via Francigena.
Jour 1 : Massa – Valpromaro (45 km – 500 m D+)
Premiers tours de roue
Parties à l’aube de Grenoble, nous arrivons à Massa en début d’après-midi. Nous laissons Tornado, notre van au camping Giardino. Le temps de déjeuner et de finaliser nos montures et hop, nous sommes en selle. Commencer la Via Francigena à partir de Massa est simplissime : il suffit de longer la mer pour trouver les premiers panneaux de balisage. Nous ne résistons pas à l’envie d’aller tremper nos pieds dans la Méditerranée. Mais l’eau est trop froide pour envisager de se baigner et, de toute façon, nous avons trop envie d’en découdre. C’est l’excitation typique du premier jour de voyage à vélo.
Une erreur dans le calcul du dénivelé ?
Nous quittons rapidement le littoral pour rouler vers les premiers reliefs de l’étape. Une première montée nous permet de prendre de la hauteur et de profiter d’un panorama superbe sur la côte méditerranéenne et sur l’île d’Elbe, au loin. Je m’aperçois que cette première « bosse », je ne l’avais pas prévue dans le calcul du dénivelé. Ça part bien… Nous redescendons en vallée. Les jardins sont luxuriants : orangers, citronniers, glycines, agaves, cactus… Ici, le climat est propice à l’épanouissement d’une flore exubérante et tellement exotique pour nous.
La montée à Valpromaro se fait dans la douleur pour Marine. Migraine, allergies liées au pollen… Heureusement, l’équipe de volontaires de la Casa del Pelegrino nous a concocté un bon petit repas. Nous sommes les seules à dormir là ce soir et on se fait dorloter par Angelo, Luisa et Ugo.
Jour 2 : Valpromaro – San Miniato (73 km – 450 m D+)
En route pour Lucca
Au matin, on partage le petit-déjeuner comme à la maison en compagnie de nos 3 amis italiens. Nous parvenons à partir tant bien que mal à 9h après une longue séance photos et abbraccio. De Valpromaro, la VF (comprenez Via Francigena) emprunte une route de montagne sinueuse à l’écart de la route principale. La descente offre des points de vue superbes. Arrivées dans la plaine, on quitte la route pour emprunter un chemin le long de la rivière Serchio jusqu’à Lucca.
Visite de Lucca
On cède au traditionnel tour des remparts à vélo. En ce lundi de Pâques, à 11 heures, on n’est visiblement pas les seules à avoir eu cette idée ! C’est noir de monde ! Ça court, ça marche, ça pédale, ça fait de la rosalie, ça mange des glaces… On déambule en ville, sans idée précise jusqu’à ce que nous trouvions la terrasse parfaite pour notre première pause caffè. En Italie, c’est une institution et nous nous mettons vite au pli ! Premiers tiramisu pour Mathilde et moi. Miam !
Après Lucca, le parcours est agréable, mais assez urbanisé. On traverse de temps à autre des petits villages. Plus loin, la VF emprunte de jolis sentiers forestiers avec quelques montées mémorables !
Arrivée à San Miniato
La montée finale à San Miniato finit d’engloutir nos dernières forces. Le village est très animé : c’est jour de marché ! On déambule dans les rues après avoir déposé nos affaires à l’auberge. Le soir, nous sommes inquiètes car Mathilde a une vive douleur au talon d’Achille. Aïe, aïe, aïe ! Plusieurs solutions sont envisagées : celle qui est retenue est d’essayer de raccourcir l’étape du lendemain et de voir comment évolue la douleur. On croise les doigts pour la suite du voyage.
Jour 3 : San Miniato – San Gimignano (58 km – 1100 m D+)
L’équipe se sépare
Ce matin, nous dévalisons la pasticceria Maurizio avec un assortiment de cornetti et de biscotti qu’on déguste dehors, devant l’auberge, avec une vue panoramique sur la campagne toscane. Mathilde, sur les conseils d’une amie kiné, modifie quelques réglages sur son vélo.
On peut résumer assez facilement le début de l’étape : de vraies montagnes russes ! Au bout d’une dizaine de kilomètres, l’équipe se scinde en deux. Marine et Mathilde visent de rejoindre San Gimignano par la plaine tandis que Bérengère et moi poursuivons sur l’itinéraire de la VF. Les côtes sont redoutables, mention spéciale à celle qui nous cueille en arrivant au village de Gambassi Terme. C’est l’heure de la pause et de l’achat de victuailles pour refaire le plein d’énergie. L’épicier, sympa, nous offre un gâteau de riz avec un grand sourire.
Erreur d’itinéraire
Requinquées, on repart la fleur au fusil, en suivant toujours le balisage officiel. Au terme d’une longue descente, je décide de vérifier la trace sur l’application dédiée. Consternation : nous ne sommes pas du tout sur l’itinéraire. Il y a bien un balisage VF, mais il s’agit d’une variante, plus longue. Demi-tour. Bilan de l’opération : quelques kilomètres en plus et environ 150 mètres de dénivelés dont on se serait bien passé.
San Gimignano
On finit par apercevoir la silhouette typique de San Gimignano, hérissée de tours. Ultime descente avant l’ultime montée. On retrouve Marine et Mathilde qui sont arrivées avant nous et en ont profité pour tester la terrasse d’un restaurant bien sympathique. Nous faisons le tour de la ville, prise d’assaut par les touristes.
Un bivouac de luxe
Ce soir, c’est bivouac ! Après avoir quitté la route, on rejoint une strada biancha, ces routes blanches typiques de Toscane. On aperçoit un homme en train de jardiner. Je prends mon courage à deux mains, essaie de parler mon plus bel italien et lui demande s’il connaît un endroit où nous pourrions poser la tente. Il nous explique qu’il travaille pour l’agriturismo Poggio Alloro, mais ne voit pas d’inconvénient à ce qu’on bivouaque dans le champ d’oliviers qui surplombe la propriété. De là, nous profitons d’une vue incroyable sur San Gimignano. Nous sommes chanceuses ! Pour ne pas trop profiter de nos hôtes, on décide de prendre le petit-déjeuner à l’agriturismo le lendemain.
Jour 4 : San Gimignao – Sienne (47 km – 730 m D+)
Petit-déjeuner gargantuesque
Le réveil avec la vue dégagée sur San Gimignano fait rêver. Et la perspective d’un bon petit- déjeuner aussi. Revêtues de nos seyantes tenues de cyclistes, nous faisons notre entrée dans l’agriturismo. La vision du buffet débordant de victuailles nous enthousiasme, mais ce n’est que la partie émergée du festin : yaourts, céréales, pain, fromages, œufs, jambon, gâteaux, etc. On fait honneur à cette profusion de nourriture et le départ n’en est que plus tardif.
Strade bianche
L’étape du jour fait la part belle aux strade bianche où l’on croise malgré tout des voitures roulant parfois à vive allure, sans se soucier du nuage de poussières qui nous enveloppe à leur passage. Le ciel s’assombrit à vue d’œil, mais les nuages parviennent encore à retenir leur cargaison humide.
Après le village de Colle d’Elsa, on roule sur une portion plate à l’emplacement d’une ancienne voie ferrée.
En fin de matinée se dresse la muraille imposante de Monteriggioni. Nous faisons un petit détour pour visiter le bourg et déjeuner de tramezzini et de biscotti.
Sienne, nous voilà !
L’arrivée à Sienne se fait attendre. Mais cela valait le coup d’être patient. La ville est superbe. On s’amuse à se perdre dans son dédale de ruelles moyenâgeuses. Si les voitures n’étaient pas là, on n’aurait aucun mal à se sentir citoyennes du duché de Sienne au XIVe siècle ! Le soir venu, on dégote une bonne adresse de pizzeria où on se régale pour trois fois rien.
Jour 5 : jour off à Sienne (12 km à pied)
Visite du jardin botanique
Aujourd’hui, pas de vélo. Il faut bien reposer un peu les jambes et les fessiers. La perturbation annoncée n’arrive toujours pas et le ciel nous réserve même quelques éclaircies. Après avoir déambulé dans les ruelles tortueuses et avoir admiré quelques merveilles architecturales (la cathédrale, la piazza del Campo, etc.), nous décidons de visiter le jardin botanique, le seul havre de verdure de la ville. Ce n’est pas très grand, mais ce jardin permet de se noyer dans le vert et dans une ambiance sonore de gazouillis d’oiseaux parfaitement charmante. On y croise écureuils, grenouilles, pics verts, geais, merles ainsi qu’une multitude d’espèces d’arbres et d’arbustes, cactus, agaves…
La fabuleuse histoire des contrade à Sienne
Après cet intermède bucolique, nous reprenons le chemin de la ville quand soudain, notre regard est attiré par une drôle de plaque ornée d’un rhinocéros avec la mention « contrada delle selva ». Mais qu’est-ce que c’est ? En faisant une petite recherche, nous apprenons que Sienne était anciennement divisée en 50 contrade, sorte de quartiers qui se regroupaient sous la bannière d’un animal emblématique. Aujourd’hui, il n’en reste que 17.
Nous nous donnons l’objectif de trouver les insignes de ces 17 quartiers, façon ludique de découvrir la ville. Comme la pluie finit bel et bien par arriver, nous échouons près du but : il ne nous manque plus que les contrade du Porc- épic, de la Panthère et du Dragon. Mais il pleut vraiment trop fort. Seuls les oiseaux et les agriculteurs sont ravis.
La pluie arrive !
On court se réfugier dans un salon de thé à l’atmosphère très british. Qui dit salon de thé dit… thé et gâteaux ! On se laisse tenter par toutes sortes de tartes et gâteaux tous plus alléchants les uns que les autres.
Ce soir, la cheffe Bérengère nous prépare un risotto aux asperges et aux champignons. On prend des forces car l’étape du lendemain promet d’être très humide. Un tel déluge est annoncé que nous avons même imaginé louer un triporteur pour faire l’étape. Ce serait tellement italien ! Malheureusement, cela restera un rêve.
Jour 6 : Sienne – San Quirico (56 km – 840 m D+)
3h de pédalage sous des trombes d’eau
Au matin, les nuages lourds annoncent la couleur. On enfile nos tenues de combat ! Les premiers coups de pédale se font pendant une accalmie bienvenue, mais on se fait copieusement arroser à peine sorties de Sienne.
On arrive bien vite dans la campagne. Les premiers kilomètres nous réservent cependant quelques tronçons de route désagréables où il vaut mieux ne pas faire d’écart. Peu à peu, de beaux paysages verdoyants nous entourent, mais il pleut tellement que nous avançons la tête dans le guidon. Quel dommage ! C’est censé être l’une des étapes les plus belles du voyage. Après 3h de pluies intenses, nous faisons halte dans un restaurant à Ponte. Nous sommes visiblement les seules touristes ici. Trempées, nous dégoulinons jusqu’à notre table. Un plat de tagliatelle alla boscaiola et des faggioli all’ occevello plus tard, nous sommes prêtes à reprendre la route. Miracle : le ciel, encore menaçant, nous épargne pour le reste de la journée.
Le ciel nous épargne
Les paysages toscans déroulent leurs ondulations dans un camaïeu de verts surprenant. Ici, le territoire se partage entre vignes, prairies, cultures de céréales, tapissant les collines de vert et de jaune. Parfois, de belles bâtisses coiffent le sommet des collines avec des allées de cyprès bordant les strade bianche.
Le village de San Quirico d’Orcia
Au terme d’une dernière montée de 5 kilomètres, le vieux village de San Quirico d’Orcia se dévoile. Une ultime côte me fait pester contre les italiens, que je juge définitivement bien mauvais pour tracer des routes pour les cyclistes.
L’auberge locale dispose d’une dernière chambre libre. Ouf ! On évite un bivouac humide. Ne mettant pas de cuisine à disposition des voyageurs, nous faisons réchauffer notre risotto au réchaud dans la chambre, ce qui est évidemment formellement interdit.
A la nuit tombée, nous nous promenons dans le village le temps de boire un bon verre de vin local chez Vald’O et photographier la mythique Panda 4×4 chère à Marine. Affûtée comme jamais depuis sa « chasse » aux contrade, elle repère vite les emblèmes locaux : l’aquila, il draco, il castello. Visiblement, cette tradition a essaimé autour de Sienne.
Jour 7 : San Quirico – Radicofani (42 km – 840 m D+)
Petit-déjeuner au bar Centrale
Avant de donner les premiers coups de pédale de la journée, nous prenons le petit-déjeuner au bar Centrale. Retenez l’adresse. J’y mange le meilleur croissant au chocolat de tout le voyage. Ce matin, le soleil est là, mais le ciel bourgeonne déjà de cumulus. Il faut y aller car je ne suis pas sûre que cela tienne toute la journée.
Des paysages de rêve
Nous pédalons aujourd’hui dans le Val d’Orcia. La descente sur Bagno Vignoni révèle un paysage panoramique extraordinaire. Dans le village, nous nous arrêtons admirer l’immense piscine thermale en son centre, puis nous poursuivons notre route. On en prend plein les yeux !
Petit détour par les sources chaudes des bagni San Filippo
Le vent se lève et souffle fort. Nous quittons momentanément la VF pour faire un détour par les Bagni San Filippo. Arrivées là-bas après quelques centaines de mètres de dénivelés, c’est la déception car le site est bondé. On parvient quand même à barboter dans une vasque à l’eau chaude sous le regard dubitatif de Marine et Bérengère qui préfèrent rester au sec. Il est vrai que l’odeur d’œuf pourri n’incite pas à la trempette. Ramollies, on reprend la route : il ne reste que quelques kilomètres et 400 mètres de dénivelés pour arriver à Radicofani.
Luigi
Avec le vent qui souffle fort, la fin de l’étape du jour est presque périlleuse. Il faut se cramponner au guidon et être concentrée sur son cap. Radicofani est encore un de ces magnifiques villages perchés si nombreux en Italie. Nous prenons la décision de dormir à l’ostello de la piazza San Pietra, et non en bivouac, car la pluie doit faire son retour pendant la nuit. Bien nous en a pris. Dans cet hébergement de pèlerin, nous faisons la connaissance de Luigi, un romain qui se rend à Lourdes puis à Fatima, aux confins du Portugal. Ancien steward, il parle un très bon français, malgré un accent italien terrible. Sociable et très sympathique, on finit par l’inviter à partager notre table au restaurant La Grotta. On passe une excellente soirée en sa compagnie et il nous donne plein de bonnes adresses à Rome.
Jour 8 : Radicofani – Bolsena (59 km – 710 m D+)
Un petit air de paysage auvergnat
Aujourd’hui, l’objectif est d’arriver à Bolsena avant la pluie annoncée en milieu d’après-midi. Ça commence mal : au lieu de filer à toute vitesse par la route, le balisage de la VF bici nous fait emprunter un chemin typé montagnes russes. Les vélos sont mis à rude épreuve. Le vent souffle déjà en tempête, de face bien entendu. Les paysages sont magnifiques et leur beauté est exacerbée par un ciel pommelé de cumulus déjà bien joufflus.
Petite halte à Proceno en fin de matinée pour éviter l’hypoglycémie. Après une descente escarpée, une montée non moins raide nous attend pour rejoindre le bourg d’Aquapendente. Je peste !
Avis de tempête
On décide de poursuivre jusqu’à San Lorenzo pour profiter de la vue sur le lac de Bolsena tout en déjeunant. Le ciel se fait de plus en plus menaçant et on voit très nettement de gros nuages noirs nous rattraper. Et en effet, lorsque nous arrivons au belvédère de San Lorenzo, nous apercevons des nuées venir de l’Ouest. On grignote rapidement tout en préparant les affaires de pluie. Le lac, immense et noir, moutonne de toute part et les premières gouttes tombent alors que nous sommes sur le point d’entamer le dessert. Mamma mia ! Décision est prise de manière collégiale de descendre sur les rives du lac par la route et non par la VF qui ondule sur les collines avant de rejoindre la ville de Bolsena.
Il nous reste 10 kilomètres à faire, dont 5 en descente. En l’espace de 15 minutes, on perd plusieurs degrés et c’est transies de froid que nous arrivons à Bolsena. Nous trouvons refuge dans un bar le long du lac où nous commandons des boissons chaudes et des crêpes.
A la recherche d’un hébergement au sec !
Encore une fois, je dois me résigner à trouver une solution d’hébergement en dur à la place d’un bivouac au bord de l’eau. Après avoir parcouru en long, en large et en travers toute la côte autour de Bolsena et n’avoir essuyé que des refus, nous trouvons une chambre libre à la Pensione italiana dans le centre de Bolsena, hébergement pour le moins atypique. Décoration baroque, kitsch, inclassable, on se croirait téléportées dans un film de Wes Anderson, version Grand Budapest Hôtel.. Apparemment, parmi ses nombreuses missions, notre hôtelier, attribue l’ordre de passage à la salle de bains !
Jour 9 : Bolsena – Viterbo (41 km – 585 m D+)
L’hôtelier dame pipi
Ce matin, nous sommes pressées de profiter du lac sous le soleil. Le maître d’hôtel est évidemment
la première personne que je croise à 7h50 sur mon passage pour aller aux toilettes. Un homme qui voulait y aller aussi à ce moment-là se fait gentiment réprimander car il y a déjà une ragazza – moi – qui utilise les lieux. L’hôtelier est aussi dame pipi ! On se hâte de préparer nos affaires et d’équiper nos vélos, toujours suivies par notre chaperon. Gentil, mais oppressant jusqu’au bout !
Le lac de Bolsena
Nous prenons le petit-déjeuner sur l’herbe au bord du lac, désormais paisible et accueillant. Nous prenons notre temps car l’étape du jour est plutôt courte. Tant mieux, la fatigue commence à se faire sentir dans les jambes. On s’éloigne progressivement de la rive du lac tout en prenant de la hauteur. A Montefiascone, la vue sur le lac de cratère est saisissante.
Une course épique
Vue sur le lac depuis Montefiascone
Nous croisons des vététistes en mode bikepacking avec un dossard Italy Divide. Certains ont l’air épuisé. Il s’agit d’une course en autonomie de 1200 kilomètres, de Pompéi au lac de Garde, et de 22 000 mètres de dénivelés ! Respect !
Voie romaine pendant la traversée de la Toscane en vélo
Notre itinéraire nous fait emprunter un bout de voie romaine parfaitement conservée. C’est clairement inconfortable avec nos vélos chargés, mais c’est sympa de se dire que cette route existe en l’état depuis plus de 2000 ans. Nous sommes maintenant dans un paysage verdoyant de campagne. Au loin, nous apercevons Viterbo, point final de notre étape du jour.
Les thermes de Bagnaccio
Les thermes de Bagnaccio se trouvent littéralement sur la VF. C’est trop tentant : on s’arrête prendre un bain chaud. En ce jour férié, il y a du monde, mais on arrive à trouver de la place dans les bassins. Il y en a 5, classés selon leur température. A vue de nez, l’eau de B1 doit être aux alentours de 26 degrés, B2 de 30 degrés et B3 de 34 degrés. Notre témérité s’arrête là et on se contente de tremper furtivement les pieds dans B4 et B5. Trop chaud !
Havre de paix à Viterbo
Relaxées – ou ramollies, c’est selon – on se remet en selle pour les derniers kilomètres. Direction la fattoria Barbini, un agriturismo situé à deux pas de la ville. Nous sommes ravies, les lieux sont d’un calme absolu. C’est beau, c’est vert, la chambre est cosy, les serviettes moelleuses… C’est le paradis !
Jour 10 : Viterbo – Lago di Monterosi (51 km – 825 m D+)
Elisa, la propriétaire, nous a préparé un petit-déjeuner copieux. On fait honneur, sans se presser. La trentaine, allure sportive, Elisa gère seule l’accueil des touristes comme nous dans son agriturismo, s’occupe des animaux (poneys, chèvres, chiens, chats, etc.), récolte du miel et des olives pour en faire de l’huile. On prend congé, non sans avoir glissé un litre d’huile d’olive et un pot de miel dans les sacoches, pas assez lourdes.
L’étape du jour est encore une succession de montagnes russes à n’en plus finir dans une belle campagne très verte à cette saison. Le relief peut paraître ridicule, mais à la fin de la journée, cela représente plus de 800 mètres de dénivelés.
Jour de marché pendant la traversée de la Toscane en vélo
En fin de matinée, on passe par le village de Vetralla. Rien d’extraordinaire dans ce village, mais c’est jour de marché. Ça tombe bien car nous avons besoin de refaire le plein de victuailles. Ne l’oublions pas, le carburant du cyclo-voyageur, c’est la nourriture. Pour information, c’est même le principal poste de dépenses du voyage. On repart avec, dans nos besaces : 500 grammes de mozzarella di Buffala, du basilic, des fraises, des tomates. Quelques kilomètres plus loin, à l’ombre d’un noisetier – c’est l’arbre roi de la région – nous dégustons tout cela avec plaisir.
Chose étonnante sur le parcours, nous traversons une superbe forêt de chênes avec un ruban de goudron lisse à souhait (ça aussi c’est très rare !).
Pause glaces
A Sutri, on fait un détour par le centre-ville, ce qui signifie évidemment une côte supplémentaire. Mais nos efforts sont récompensés par une dégustation de glaces sur une jolie placette. Il y a déjà trois petites mamies qui ont l’air de se régaler. Elles ont toutes pris le même parfum : fondente arancia et me disent que c’est une tuerie (liberté de ton dans la traduction) !
Bivouac au lac de Monterosi pendant la traversée de la Toscane en vélo
Normalement, l’étape officielle s’arrête à Sutri, mais nous voulons avancer un peu plus car il reste beaucoup de kilomètres à faire avant d’arriver à Rome le lendemain. Nous poursuivons donc jusqu’au lac de Monterosi que Marine a repéré sur la carte. A 17h, les rives du lac sont encore encombrées de promeneurs. Nous traversons une grande prairie fauchée et nous nous installons à l’écart, près d’une petite plage entourée de roseaux et de saules pleureurs. Le voilà donc, mon bivouac au bord de l’eau ! Pour ne pas gêner et risquer d’être délogées, nous attendons que la nuit tombe pour monter les tentes. Un ragondin passe, tranquille. Je passe la pire nuit du voyage, à grelotter à cause du froid : mon sac de couchage confort 10°C n’était clairement pas suffisant !
Jour 11 : Lago di Monterosi – Rome (68 km – 740 m D+)
Après cette nuit peu reposante, le réveil est laborieux. Tout est humide, les tentes sont trempées. Il nous faut un peu de temps pour lever le camp. Sur son vélo, très vite, Marine s’aperçoit que son frein arrière frotte en permanence. Aïe !
On chemine sur une piste forestière assez large : un écureuil se laisse admirer, peut-être pétrifié par la peur, je ne sais pas.
Problème mécanique lors de la traversée de la Toscane en vélo
Marine a beau être sportive et avoir un moral d’acier, elle doit s’arrêter pour tenter de trouver une solution à son problème de frein. On repart. Ça semble mieux l’espace de quelques minutes, mais en fait non. On s’arrête de nouveau. On entoure le vélo de Marine, on inspecte, on se penche, on souffle pour enlever de la poussière. Il faut bien avouer qu’aucune d’entre nous n’est franchement spécialiste en mécanique vélo. Je propose de regarder un tutoriel sur Internet. Rien n’y fait. Pire, une giclette d’huile s’échappe du vélo. Aïe, aïe, aïe !
Il faut se rendre à l’évidence : nous avons besoin d’aide. Heureusement, il y a un village tout proche. Je suis confiante dans le fait de trouver un mécanicien touche-à-tout qui saura remettre d’aplomb la monture de Marine.
La bienveillance italienne à l’œuvre
Arrivées dans le village au terme d’une montée harassante à pousser les vélos, on se met en quête de notre sauveur. Au final, pas moins de 7 personnes s’impliquent dans notre problème et nous permettent de trouver le garagiste du village, qui est aussi, heureuse coïncidence, un passionné de VTT. Massimo interrompt la réparation qu’il était en train de faire sur une voiture pour nous aider. Il sort le pied d’atelier, les outils et s’attaque au vélo de Marine. En 30 minutes, il parvient à réparer le vélo. Nos tentatives pour le payer restent vaines.
Nous repartons en direction du sanctuaire du Sorbo pour y déjeuner. Comme d’habitude, ça monte raide et ça descend raide. Le disque arrière refait des siennes alors que tout allait bien à la sortie de l’atelier. Mince !
Une décision difficile
Nous pique-niquons à l’ombre d’un arbre près de l’église et nous prenons la décision de nous séparer. Il reste environ 45 kilomètres pour rejoindre Rome, distance bien trop importante pour le vélo de Marine qui n’est pas en forme. Marine et Mathilde repartent pour 15 kilomètres, distance minimale pour rejoindre la gare la plus proche. Bérengère et moi repartons sur la route terminer la VF.
Arrivée à Rome pour traversée de la Toscane en vélo
La fin de l’étape n’est pas incroyable, mais elle a le mérite de nous faire entrer dans Rome à vélo via une piste cyclable le long du Tibre. Avant de rejoindre cette piste, il y a quand même un passage extrêmement dangereux à vélo (et à pied). Combien de pèlerins sont morts à quelques kilomètres de Rome ? je m’interroge.
Arrivées à Rome, c’est un peu le choc : plein de voitures, de scooters, de trottinettes, de piétons, de bruit… On parvient à tracer la route jusqu’à notre hébergement pour les jours à venir en passant faire une petite photo devant la basilique Saint Pierre, symbole de la fin de notre voyage.
Retrouvailles avec Marine et Mathilde
Nous retrouvons Marine et Mathilde qui ont fait bon voyage en train. Dommage de ne pas avoir partagé avec elles ces derniers kilomètres. Une fois installées et les vélos sécurisés dans la cour intérieure de l’immeuble, nous partons fêter notre arrivée au restaurant indiqué par Luigi.
Le restaurant Formula 1
Le lieu s’appelle Formula 1, à la décoration évocatrice. Sans Luigi, il est certain que nous ne serions jamais rentrées là. Augusto, l’un des serveurs, nous indique une table. Il est tranquille, à l’allure nonchalante, mais hyper gentil et efficace. Dans ce restaurant, la friture est reine et on ne se fait pas prier. On teste les crochette di patate, les fior di zucchine fritte, le baccalo fritto, les patate fritte, les bruschette, la pizza al gorgonzola… Augusto nous ayant pris en sympathie, il nous offre une tournée de limoncello, histoire de faciliter la digestion de tous les lipides ingurgités. Nous sortons du restaurant rassasiées et guillerettes.
Jour 12 et 13 : visite de Rome (42 km à pied)
Visiter Rome en 2 jours est mission impossible. Il y a tant de choses à voir ! Nous prenons le parti de tout faire à pied. Selon moi, c’est la meilleure façon de visiter la ville, mais mieux vaut être en forme. En 2 jours, nous parcourons 42 kilomètres et quadrillons Rome d’un bout à l’autre. Je suis agréablement surprise par la multitude de parcs, petits ou grands, qui se trouvent au cœur de la ville. Cette verdure est bienvenue, surtout lorsque le thermomètre grimpe. En revanche, après plus de 10 jours à pédaler dans des paysages de collines et de campagne, je n’apprécie pas la foule. Autour du Colisée et du Forum, centre touristique névralgique de Rome, partout, des touristes et des vendeurs à la sauvette qui tentent avec plus ou moins d’insistance de vendre des perches à selfie, des batteries nomades ou des tours en bus à impériale.
Jour 14 : retour à Massa
Retour en train
Alors que j’appréhendais le retour en train, toujours un peu stressant quand on voyage à vélo, ce n’est finalement qu’une formalité. Le plus difficile est de sortir du lit à 5h30 du matin. En effet, le seul train acceptant les vélos non démontés part de Rome à 6h15. Arrivées sur le quai de la gare, nous avons l’agréable surprise de constater qu’il s’agit d’un train moderne où l’accès des vélos est simplissime. Formidable !
La deuxième partie du trajet, de Pise à Massa, est nettement moins confortable. Le train est bondé et nous ne sommes pas seules à transporter nos vélos. La partie de tétris dure 45 minutes.
Baignade dans la Méditerranée après la traversée de la Toscane en vélo
A Massa, cette fois-ci, nous sommes bien déterminées à nous baigner entièrement. Malgré une eau à 16 degrés environ, on se plonge avec délice dans la Méditerranée ! La boucle est bouclée.
Conclusion sur la traversée de la Toscane en vélo
Ce voyage signe la fin de ma découverte de la Via Francigena. Dans sa partie italienne, cet itinéraire offre des paysages variés, des hautes montagnes de la vallée d’Aoste aux collines toscanes en passant par la plaine du Pô. C’est un très bel itinéraire à faire à vélo que je ne peux que recommander. Au-delà de l’itinéraire, c’est aussi l’ambiance italienne que j’aime et qui contribue à rendre ce voyage mémorable : ce sont des odeurs, des saveurs, des rencontres… Et le plaisir de partager tout cela avec des amies bien sûr.
Le retour en train depuis Rome m’a permis de constater qu’une fois en Italie, il est finalement assez facile de voyager avec son vélo. Cela ouvre de nouvelles perspectives pour de futures itinérances à bicyclette. J’ai déjà plein d’idées en tête !