Stéphane Mari nous partage son expérience de la pêche et nous offre des conseils pêche à la mouche pour les réservoirs de la Landie et de Virieu-Le-grand.
Présentation de Stéphane MARI :
Stéphane Mari, 41 ans, chercheur en biochimie et physiologie végétale, et pêcheur depuis mes plus anciens souvenirs… Depuis plus de 15 ans je me suis centré sur des techniques de pêche aux appâts artificiels, incluant la pêche des carnassiers aux leurres et la pêche à la mouche. Mes spots de pêche sont la lac du salagou, l’Hérault, La vis, l’orb, le réservoir de la Landie et de Virieu-Le-Grand.
Mes liens utiles :
Mouches de charettes-JMC
La boite à mouche: Je n’achète pas de mouches, mais ce site m’inspire beaucoup pour le montage de mouches (sèches, nymphes, streamers…)
Réservoir pêche à la mouche la Landie
Réservoir pêche à la mouche Virieu-Le-Grand
Comment appréhender une session de pêche à la mouche en réservoir ?
J’ai voulu faire un comparatif entre deux extrêmes, le lac de la Landie et l’étang de Virieu-le-Grand. Le choix de ces deux réservoirs est un peu provocateur et extrême, mais c’est un choix délibéré.
Que peuvent avoir en communs ces deux plans d’eau: La Landie et Virieu Le Grand ?
Ils sont situés dans des régions montagneuses :
- Au pieds du puy de Sancy dans le Département du Puy de Dôme pour la Landie
- Pour Virieu, au pieds du Grand Colombier dans le Département de l’Ain
Pour les deux les conditions climatiques peuvent être assez rudes. Ils sont tous les deux des plans d’eau naturels:
- lac alimenté par des ruisseaux, en bordure d’une tourbière pour la Landie
- Etang situé sur l’ancienne vallée glaciaire du Rhône, alimenté par des sources pour Virieu-le-Grand
Bien que de superficies très différentes :
- 33 ha pour la Landie
- 4 ha à Virieu
Les deux lacs ont en commun une profondeur assez importante, par rapport aux autres réservoirs (environ 15 mètres max dans les 2 cas), ce qui peut déstabiliser les non-habitués, surtout quand on envisage de pêcher au streamer, au beau milieu du lac.
Au chapitre des différences, la plus évidente est la superficie, mais à mes yeux la différence de couleur de l’eau l’est tout autant:
- A la Landie on est sur une eau de tourbière, à la couleur de thé (ou de vieux whisky) très intense. Dans ces conditions la pêche à vue est quasiment impossible, sauf sur les truites aquabonitas (jaunes) qui rodent sous la surface ou en pêchant tout prêt des roselières dans très peu d’eau. A la Landie il faut plutôt s’appliquer à rechercher les signes d’activité des poissons (gobages, sauts, marsouinages).
- Les eaux de Virieu sont cristallines (« putaing ! on pêche dans de l’évian con! ») ce qui fait de ce lac l’endroit rêvé pour les pêches fines à vue. L’inconvénient majeur étant que si on les voit, elles nous ont vu aussi, et depuis longtemps.
Pratiquant la pêche à la mouche dans ces deux réservoirs depuis plusieurs années, je trouve que l’approche que j’ai pu développer n’est pas très différente pour l’un ou pour l’autre. Il faut beaucoup observer, réagir rapidement, savoir s’adapter et ne pas partir avec trop d’idées préconçues, ça peut être fatal (le capot n’est alors jamais très loin).
Conseils pêche à la mouche en sèche sur la Landie et Virieu le grand
Mais avant il me semble bon de vous partager quelques informations sur le réservoir de la Landie.
Quelques conseils pêche à la mouche pour le réservoir La Landie selon les conditions du vent.
Voici le plan du réservoir de La Landie que vous pourrez retrouver au Lodge, au dessus de la table montage de mouche, vous conseillant les zones de pêche à la mouche selon les orientations du vent.
Quelques conseils pour la pêche à la mouche selon le sens du vent
Vent du Sud:
En raison du relief, il se forme une poche de surface calme au centre du Lac de La Landie. Les débris végétaux y sont nombreux. De bon secteur difficile à pêcher à cause des tourbillons aériens. La bordure est à surveiller de près car c’est le point de chute de plusieurs variétés de coléoptères terrestres.
Les bonnes zones: Amazonie,La tourbière et proche du Lodge
Vent d’Ouest:
C’est l’orientation la plus favorable pour la pêche à la mouche. Le plateau situé devant le lodge, au départ du vent est très productif, mais les dérives centrales ne doivent pas être ignorées.
Les bonnes zones: de la sortie du port immédiatement et toute la bordure gauche en direction de la petite Roselière.
Vent du Nord:
Pas forcément le meilleur. Frôlant les versants du Puy de Sancy, il est souvent froid. Si la température extérieure est suffisante et le vent régulier, la zone centrale est à surveiller ainsi que l’Amazonie, souvent calme
Les bonnes zones: Amazonie,Cap fario et la Petite Roselière
Vent d’Est:
Soufflant dans l’axe longitudinal du plan d’eau, il permet d’effectuer de très longues dérives. En cas de vent fort, l’Amazonie est un secteur souvent fréquenté. L’axe central ne doit pas être négligé.
Les bonnes zones: Amazonie à droite et gauche,La petite Roselière et proche du Lodge
Conseils pêche à la mouche en sèche sur la Landie et Virieu le grand
Voir un monstre de 4kg monter tranquillement prendre une mouche sur hameçon de 16 est ce que cette pêche peut offrir de plus spectaculaire et passionnant!
Pour ma part, comment je m’y prend : premier allié, le vent. Rien de nouveau dans ce que je raconte ici. En eaux closes le vent génère des courants en surface qui drainent les larves en cours d’éclosion, les insectes tombés dans l’eau depuis les berges. Quand le vent est suffisamment établi les truites remontent souvent ces couloirs de vent pour trouver de la nourriture. En regardant bien on voit les gobages qui se succèdent en remontant le vent. Quand on arrive à voir ce manège il faut absolument pêcher en dérive.
Concrètement, il faut arriver à placer sa barque sur un côté par rapport aux gobages, pour dériver parallèlement aux gobages et pratiquer une pêche d’interception (lancer si possible un peu en amont des gobages). Pour une pêche plus « à poste », on va également trouver des poissons au départ du vent (là où le vent arrive sur le lac, à la limite entre le lisse et le frisé) et sur la berge battue par les vents. Sur un grand lac comme la Landie, le vent a le temps de générer de vrais couloirs, très marqués, on peut alors vraiment faire de longues dérives. Il faut bien observer, les poissons peuvent être spécialement concentrés sur une frange assez étroite, soit au milieu du couloir de vent, soit à la marge, juste à la limite entre le frisé et la partie plus calme. Sur un petit plan d’eau, ces couloirs de vent sont un peu moins évidents, les gobages peuvent être plus éparpillés, mais je cherche toujours à poser ma mouche un peu en amont du gobage repéré, par rapport au sens du vent.
Matériel utilisé pour pêcher en Sèche
Pour ce type de pêche j’utilise du matériel type rivière, canne de 9 pieds, soie WF5 avec un bas de ligne qui se termine par une pointe (1m, 1m50) en 16 centièmes, jamais moins. La surface de l’eau, troublée par les vaguelettes, permet d’utiliser ce diamètre. En dessous de 16/100 le risque de casse est trop élevé à mon avis pour justifier de descendre en diamètre.
Bas de ligne pour pêcher en sèche:
Même début que le précédent jusqu’au 30/100, puis 30 cm en 20/100 et la pointe (env 1,2m) en 16/100 fluorocarbone.
Les premiers brins sont toujours en nylon (Kamoufil JMC), pour leur élasticité.
Quelles mouches j’utilise ?
En sèche:
Toute la panoplie de sedges qu’on utilise pour la rivière. Le seul modèle que je monte spécialement pour le réservoir est un Elk Hair Caddis orange assez gros : corps en dubbing de phoque orange, sous-aile en cul de canard, aile en poils d’élan ou de cervidé quelconque. Ca flotte bien mais bas sur l’eau, on peut le faire draguer sans qu’il ne coule trop vite.
Je monte également des petites mouches noires cerclées de tinsel holographique à la façon des altières, avec une paire d’ailes à plat sur le dos.
Enfin, un grand classique en réservoir, le tipule (daddy long legs pour les rosbifs). On trouve plusieurs formules de montage sur le net, il faut que l’imitation soit assez grande, avec plusieurs pattes. Pour le corps j’utilise soit du dubbing de lapin (gris, noir, roux) cerclé de tinsel holographique soit des poils de chevreuil, fixés par les pointes au niveau de la courbure de l’hameçon et rabattues le long de la hampe en cerclant avec le fil de montage.
C’est beau, solide, ça flotte assez bien et c’est intéressant à monter. Une habitude à prendre : avant d’arracher la soie pour faire un nouveau lancer, toujours commencer par faire draguer un peu le tipule, il arrive assez fréquemment qu’un poisson rode autour sans l’attaquer et le fait d’animer la mouche lui donne de la vie et cela peut déclencher l’attaque…
En sèche sous la pluie
Lorsqu’il pleut, il y a une technique qui peut se révéler très efficace et spectaculaire, quel que soit le réservoir : faire draguer un gros muddler (un corps en poils de cervidé taillé en cône avec une petite queue en marabout orange) à la surface. Cardiaques s’abstenir, les poissons viennent de loin, on voit un sillage et un dos foncer sur la pauvre mouche, il faut être très zen pour ne pas ferrer trop tôt, laisser le poisson engamer et se retourner avant de relever la canne. Cette technique m’a valu des sessions mémorables à la Landie, sous une pluie battante, alors que rien d’autre ne donnait de résultats.
Pêche en noyée
Une alternative, sous la pluie, est de pêcher en noyée. J’ai souvent essayé cette technique, sans obtenir de résultats probants, sauf sous la pluie. Dans ce cas, j’utilise une grosse noyée olive ou noire, avec une collerette en perdrix et une bille, ramenée juste sous la surface (avec soie flottante ou intermédiaire). Comme pour le muddler dragué en surface, les attaques sont brutales et spectaculaires. Ne pas descendre en dessous du 18/100 !
Je n’ai pas écrit de paragraphe spécifique dédié à la pêche au chironome, car c’est une pêche que je pratique peu, donc je préfère ne pas m’étendre sur un sujet sur lequel je ne suis pas très à l’aise et je risque de raconter surtout des bêtises. Je pratique le chiro lorsque je vois des poissons près de la surface, qui tournent mais ne gobent pas.
Il y a une imitation que j’utilise depuis peu, qui permet de bien pêcher à vue et qui m’a un peu réconcilié avec ce type de pêche : la fameuse « papate ». Imitation faite avec de l’élastique rouge (ou noir) monté sur un hameçon avec des brins qui dépassent largement devant et derrière, pour imiter un vers de vase (voir sur le catalogue JMC, la mouche PJ3). Dans ce cas la pêche à vue est très amusante. Et me rappelle beaucoup celle du black bass aux leurres souples : on repère un poisson, on lance juste devant, on anime un peu pour déclencher l’attaque du poisson. Ce montage m’a valu une journée mémorable à Trept.
conseils pêche à la mouche au streamer à la Landie et Virieu le grand
La pratique de la pêche aux leurres m’a beaucoup aidé pour appréhender l’utilisation de streamers : le choix des couleurs, la profondeur de nage, le type de récupération. On se pose les mêmes questions lorsqu’on cherche les perches, blacks bass ou brochets en lac ou en fleuve.
Autre chose : dans pratiquement tous les réservoirs que j’ai visité, les plus gros poissons sont quand même régulièrement pris au streamer…
Le choix de la couleur
Là encore, rien de nouveau. Plusieurs articles ont été publiés ici et là sur le choix de la couleur, je m’en suis beaucoup inspiré.
- Premier concept : temps clair, streamer clair (blanc, orange, corail, pèche), temps sombre streamer sombre (olive, noir).
- Deuxième concept : temps ensoleillé, ajouter de la brillance aux streamers avec quelques brins de krystal flash ou autre matériau. Mais il faut profiter des rayons du soleil. Temps nuageux, jouer sur des couleurs mat, ajouter une touche de chartreuse ou de jaune sulfure aux streamers (allez voir le coloris mat-tiger des leurres…).
En plein hiver, par temps très couvert voire neigeux, des streamers « guirlande de Noël » montés exclusivement avec des matériaux synthétiques brillants (tout doré ou tout argenté) peuvent être redoutables. Toujours en avoir 2-3 dans sa boîte.
Conseils pêche à la mouche côté matériel
J’ai une canne de 9 pieds pour soie de 7/8, sur laquelle j’alterne des moulinets ou juste des bobines avec une soie intermédiaire. J’adore la glisse de ce type de soie en nylon plein. Une S4 et parfois une S7.
Mon bas de ligne pour streamer :
50 cm en 50/100, 40 cm en 40/100, 40 cm en 30/100, puis une pointe de 60 cm environ en 24 ou 20/100 en fluorocarbone.
Profondeur de nage et animations
Il n’y a pas de recettes miracle, il faut chercher. Ce qui est clair c’est que si au bout d’une demi-heure je n’ai aucune touche ou aucun suivi du streamer je change de coloris, de vitesse d’animation et de profondeur de nage. En général, j’ai remarqué que par temps ensoleillé avec un peu de vent un streamer orange ramené de manière rapide en alternant longue tirée avec 2-3 accélérations puis une pause est une tactique payante.
Il ne faut pas hésiter à faire des pauses, puis à redémarrer par petits coups. Comme beaucoup d’autres carnassiers, les truites peuvent suivre les leurres pendant assez longtemps sans attaquer. Une pause suivie d’un redémarrage déclenche souvent l’attaque. Ne pas hésiter à lancer sur un gobage qu’on aurait aperçu, les truites, surtout les arcs, peuvent être très agressives et s’attaquer à n’importe quoi passant pas loin.
Lorsque les conditions sont difficiles (temps sombre, pas d’activité) je monte un petit streamer noir. Je rallonge la pointe et je ramène très lentement et de la manière la plus régulière possible.
Le compte à rebours (count down)
Les poissons peuvent parfois se trouver à une certaine profondeur sur une colonne d’eau. C’est particulièrement vrai dans les deux lacs cités ici. Pour trouver la tenue des poissons, je fais parfois du compte à rebours, en utilisant la soie S4 : je lance, je compte jusqu’à 3 puis je commence à animer. Relance, compte jusqu’à 6 et animation, ainsi de suite. En faisant de la sorte on peut trouver des poissons qui se concentrent à un certain niveau et qui ne se déplacent pas beaucoup en vertical. Approche particulièrement payante à Virieu, qui est petit mais proportionnellement très profond.
Les bordures
Dans des plans d’eau qui contiennent des farios, la pêche des bordures, des bois immergés, des roselières, peut être productive et riche en émotions. Les farios, contrairement aux arcs qui sont quasi exclusivement insectivores, sont piscivores et réagissent bien sur des imitations de vairons ou de gardons. J’utilise dans ce cas des streamers « imitation vairon », avec un corps en marabout olive/marron clair, une queue orange et une tête bien marquée avec de gros yeux.
conseils pêche à la mouche : Streamer avec une bille ou sans ?
Les deux !
Beaucoup de mes streamers « génériques » sont montés avec un enroulement de marabout sur toute la hampe, pour donner beaucoup de volume dans l’eau, en noir, olive, orange, blanc. Tous les modèles sont montés en 2 versions, avec et sans bille en tête.
Je n’ai aucune explication théorique à ce sujet. Mais il m’est arrivé plus d’une fois d’être suivi par des poissons, jusqu’au bateau, sans suite. En changeant pour le même streamer sans bille, avec donc une nage plus planante et moins saccadée, en ramenant plus lentement et régulièrement, j’enchaînais les prises… C’est peut être une question de se démarquer par rapport au reste des pêcheurs qui utilisent des streamers à bille avec toujours la même animation saccadée…
Le streamer articulé
Encore une déformation due à mon côté pêcheur au leurre, mais je trouve que la nage des streamers articulés apporte un plus considérable. On en trouve quelques modèles (site de la boite à mouche par ex.) sur le net. J’en monte depuis assez longtemps, je trouve que ce type de montage est redoutable… Mon montage type a une queue en marabout orange ou corail (hameçon de derrière) et un corps en marabout olive+quelques brins de krystal flash et une bille assez lourde en tête pour faire la bascule. La nage ressemble beaucoup à celle d’un vairon casqué… On peut décliner ce montage à l’infini, je préfère néanmoins les combinaisons orange/olive, orange/beige, orange/noir, assez naturelles et prenantes.
Si vous voulez avoir d’autres conseils pêche à la mouche, vous pouvez aussi lire :
- le récit de notre WE de trois jours de pêche à la mouche au réservoir de la Landie en octobre 2011, et voir quelques photos.
1 commentaire
Hi,
Merci à l’auteur pour ce très bel article.
J’hésitais depuis longtemps à me coller au réservoir et ce mode d’emploi m’en a donné envie.
Très souvent, les articles sur le sujet sont d’une telle complexité qu’on abandonne au bout de 10 lignes (la lecture et l’envie de pêcher). Là, les bases sont posées et il n’y a plus qu’à broder là dessus.
Je vais tester les quelques idées avancées et voir ce que ça donne sur mon petit lac où les carpes abondent.
Bonne pêche à tous.