Christophe MUNCK nous partage son expérience de l’escalade de l’arête ouest de la Salbitschijen en Suisse
Informations pour préparer l’ascension de Salbitschijen en Suisse
Date :
les 2 et 3 août 2015
Lieu :
Suisse- Canton d’Uri- Göschenen-parking d’Ulmi
Depuis Montpellier : avec péage : 8 heures, 765 km
sans péage : 12 heures, 748 km
Participants :
Chris, Clément
Où dormir et se restaurer en Suisse :
- F Refuge : Salbithütte (2105m): Très bon accueil.
Tél : +41 (0) 418851431
- F Refuge bivouac : Salbitbiwak (2400m) : non gardé.
12 places maximum (matelas, couvertures, oreillers)
Réchaud à disposition
14 euros la nuit
Où se renseigner :
Le gardien du refuge Salbithütte est un ancien guide et connaît par cœur le secteur dont voici son Tél : +41 (0) 418851431
Caractéristiques autour du Salbitschijen :
La Suisse regorge de petits paradis granitiques et calcaires pour les grimpeurs. Si Chamonix est une pépite pour le grand alpinisme, la Suisse n’a rien à envier à ses aiguilles pour la pratique de l’escalade.
Pour s’en convaincre, il suffit de penser au massif calcaire des Wendenstock, des dalles granitiques du Grimsel, des aiguilles effilées des Engelhörner, du mur de la Grauewand,… et bien sûr au paradis granitique de la Salbitschijen (prononcez « Salbitchin »).
On vient de loin pour les découvrir, on finit toujours par y revenir et à l’occasion d’un séjour prolongé, en franchissant un col ou deux, on passe aisément d’un spot à un autre.
La grimpe, par ici, se vit souvent comme un challenge. Il faut y mettre toute son énergie physique (voies de 300 à 500m) mais aussi et surtout mentale de par l’envergure et l’ambiance générale des voies. Quiconque a déjà grimpé aux Wendenstock sait de quoi je parle…
On ne reste jamais sur sa fin. Et à la fin de sa carrière de grimpeur on se souvient toujours des noms de voies grimpées.
Si la Salbitschijen (2981m) a plutôt un intérêt local avec ses nombreuse voies modernes, les arêtes ouest et sud méritent qu’on vienne les courtiser, même de loin.
L’arête sud est plus facile (5a), plus courte (570 m). Comptez de 5 à 7 heures
L’arête ouest est gigantesque : 1000 m de dénivelé cumulé, 31 longueurs de corde, pas moins de 5 tours à franchir avant d’accéder à l’arête sommitale. Comptez 10 à 14 heures minimum. Elle est à juste titre une des plus belles arêtes des Alpes.
L’engagement est important car une retraite serait problématique. Des relais de réchappe existent entre chaque tour mais sont de très mauvaise qualité. A n’effectuer qu’en cas de nécessité…
Bibliographie :
Topo Schweiz plaisir ost aux éditions Filidor, 48 francs suisses
FVertical magazine n°42, juillet/aout 2013
Topo internet :
F Camp to camp : Salbitschijen arête w
L’ascension de Salbitschijen en Suisse
L’approche
On ne se lève pas un beau matin en se disant je vais faire la Westgrat (comme ils disent part ici). On en entend parler, on la découvre sur un topo, on l’admire à l’occasion d’autres courses dans le secteur, puis on y pense , on y rêve, on attend avec impatience les bonnes conditions mais aussi d’avoir la forme des grands jours…
Et puis un jour, ça y est. C’est le moment….Le rêve est prêt à devenir réalité….
Et puis tout s’accélère : on s’appelle, on définit un horaire, on prépare les sacs, on consulte la météo, on imprime le topo et c’est parti.
Un peu comme une routine, depuis le temps que nous pratiquons la montagne, nous franchissons la frontière et nous dirigeons en direction du tunnel du Gothard vers les Alpes Uranaises.
Nous connaissons précisément l’endroit pour y avoir tenté une course en ski de rando. Course qui s’était plutôt déroulée comme un combat contre les arbres….plûtot qu’un précieux moment de glisse….
En effet la montée, très raide, jusqu’au refuge gardé de la Salbitschijen se déroule pour les deux tiers dans une forêt très dense. Ce qui n’est pas gênant en été, avec le chemin entretenu comme les suisses savent le faire. Mais en hiver…c’est une autre histoire !
Nous parvenons donc sans encombre au hameau de Regliberg. Celui-ci dispose d’ ailleurs d’ un monte charge et peut vous faire monter vos sacs à dos.
Puis nous arrivons à la Salbithütte ( refuge de la Salbitschijen), buvons à la fontaine et continuons notre route en direction du Salbitbiwak.
La passerelle dans le vide
Un dernier obstacle reste à franchir : un énorme ravin de quatre-vingt-dix mètres de longueur et plusieurs centaines de mètres de profondeur. Une passerelle a été aménagée en 2009 pour le franchir.
Un seul mot :
Wahhhhhh. !!!!
Mais rien que pour me confronter au vide, le jour où je reviendrai je réemprunterai la passerelle.
Puis de l’autre côté le refuge bivouac apparaît. Comptez environ 3h30 de marche depuis le parking.
Il existe un accès plus rapide depuis le fond du vallon. Mais des recherches internet sur des forums m’avaient conduit à penser que du fait de l’existence de la passerelle il était plus commode de monter par cet itinéraire. En fait, il semblerait, aux dires d’un grimpeur, que l’autre accès passe bien quand même…
Notre campement pour la nuit avant d’escalader le Salbitschijen
La course : 1000m, 6b/A0 (5c+ obligatoire), 31 longueurs
L’attaque de la voie se situe à une cinquantaine de mètres juste au-dessus du refuge. En moins de cinq minutes nous gagnons le pied de la voie pour faire une reconnaissance de jour. Car demain matin, il fera nuit…Vue l’ampleur de la course nous devrons attaquer dès les premières lueurs pour espérer échapper à un bivouac forcé en pleine paroi. Et puis nous savons que c’est un itinéraire très prisé, nous souhaitons attaquer les premiers pour ne pas subir « de bouchons ».
Au pied de l’impressionnante première tour du salbitschijen.
Le topo du club alpin suisse indique un temps de parcours de 13 à 17 heures. Le topo Schweiz plaisir est plus optimiste : 10 à 14h.
Ce qui est sûr c’est qu’il ne faudra pas traîner….
Dans ce type d’itinéraire, il n’y a pas de secret, pour tenir les horaires il faut grimper corde tendue dans les longueurs faciles. C’est à dire que les deux grimpeurs, reliés par une corde, doivent grimper en même temps. Ce n’est pas dangereux pour autant car l’assurage est toujours réalisé par des points fixes (béquets, pitons ou plaquettes déjà en place sur le rocher) ou des points mobiles (coinceurs) que le premier place et le second récupère. La cordée est donc toujours reliée au rocher.
C’est une technique que nous avons pratiquée tout le printemps en école d’escalade jusqu’au 6a. Nous avons ainsi pu prendre confiance et faire des réglages de longueur de corde.
L’idée étant d’avoir une longueur de corde juste assez longue pour avoir toujours 2 ou 3 points de protection minimum entre les deux grimpeurs. Trop long il y a risque de tirage et coincement de corde.
Les anciens étaient maîtres dans cet art… Nous, grimpeurs de voies modernes, avons perdu cette habitude.
Départ
5h : réveil
5h15 : pied de la voie. Une cordée venant de la Salbithütte est déjà là. Nous sommes devancés… Nous prenons donc notre « ticket » pour la deuxième place.
5h30 : 5 autres cordées arrivent.
5h45 : nous attaquons la voie.
Magnifique rocher …. et le jour se lève avec nous.
Rapidement nous doublons les premiers. Et oui corde tendue, ça va plus vite, beaucoup plus vite, deux fois plus vite. Nous sommes désormais les premiers et devons chercher le bon cheminement. Il y aura parfois des loupés mais globalement nous avons eu un bon sens de l’itinéraire.
Magnifique escalade sur du magnifique granit.
Dixit le gardien de la Salbithütte, qui est un ancien guide et pourra vous fournir de précieux conseils :
«Le bon timing c’est 11 heures en haut de la deuxième tour. Au-delà il faudra bivouaquer»
(Ce qui n’est pas catastrophique car dans toutes les tours il y a des places bien plates de bivouac).
Vers la seconde tour du salbitschijen
En tout cas voilà notre repère temporel pour l’instant. Il est tôt lorsque nous parvenons en haut de la première tour. Et c’est sereinement que nous nous lançons dans la deuxième.
Magnifique arête de granite …. une invitation à l’escalade.
10h : Sommet de la deuxième tour.
Arrivée au sommet de la 2ème tour du salbitschijen
Le contrat est rempli. Mais la course est loin d’être finie…Il reste encore 3 tours ainsi que l’arête sommitale à gravir. De plus chaque tour gravie doit être redescendue en rappel (un ou deux) pour accéder à la tour suivante. Ce qui évidemment nécessite beaucoup de manipulations de cordes et le stress systématique de coincer un brin.
Vers la 3ème tour
Mais continuons notre progression. Progression, il faut bien le dire, qui est magnifique : tout est beau : le cadre, le rocher, l’itinéraire, la gestuelle de grimpe,… L’escalade est typiquement granitique : dièdres, fissures, écailles, cheminées. Et bien qu’athlétique, l’escalade reste toujours fluide. Les pas dans les longueurs en 6 sont rarement obligatoires : il est toujours possible de passer en A0 (escalade Artificielle en tirant sur les pitons en place)
Les relais sont toujours équipés (gros anneau). De nombreux pitons jalonnent l’itinéraire.Les longueurs en 6 sont équipées de plaquettes.
11h : sommet de la troisième tour
Magnifique spectacle derrière nous de la 2éme tour.
Nous ne sommes pas seul
La présence d’autres cordées sur les tours gravies ne fait que renforcer la beauté des lieux.
Il ne nous reste plus qu’à faire un rappel pour redescendre à l’attaque de la quatrième tour. Plus qu’à…. Oui plus qu’à…. Mais où est-il ce fichu relais ???
Nous commençons notre première erreur d’itinéraire en essayant de contourner le gros bloc sommital (espèce de pavé de 4m x 3m x 2m). En fait il faut le gravir en technique « sortie de bain de piscine » (ou avec une courte échelle) car c’est un mur de 2 bons mètres de haut sans aucune prise. Nous finissons par nous y contraindre et trouvons le relais de rappel.
Nous avons perdu un peu de temps, mais rien de catastrophique. Et c’est sereinement que nous attaquons et parvenons sans encombre en haut de la quatrième tour.
Sans problème nous trouvons le relais de rappel et jetons notre corde en face nord. Un beau rappel aérien nous y attend. Plus qu’à rejoindre l’attaque de la tour cinq…Oui plus qu’à….
Ce sera notre deuxième erreur d’itinéraire
nous allons trop loin au bout de la vire et nous laissons attirer par de nombreux pitons dans un mur vertical. C’est sûr que ce n’est pas le 4c annoncé par le topo. Nous remontons malgré tout ce mur en forçant le passage en A0 (présence d’une sangle pour tirer), traversons vers la droite et nous retrouvons 5m au-dessus du départ de la tour 5. Par un mini rappel nous le rejoignons.
Que de temps perdu !!! Alors que nous étions tout seul, nous voilà maintenant presque rattrapés par une autre cordée qui, elle, fera le bon choix dans son itinéraire.
ascension de la 5ème tour
Les magnifiques longueurs de la tour 5 auront vite fait de nous faire oublier nos malheureuses péripéties.
La cinquième gravie, enfin l’arête sommitale s’offre à nous.
Vers le sommet
Mais pour y accéder il faudra se contraindre à un exercice un peu particulier : faire un rappel pendulaire…
Depuis le relais chaîné (c’est le seul de la voie) il faut faire un rappel de 6m en pendulant (en traversant) vers la droite sur une dalle se trouvant au-dessus d’un petit surplomb. De là, gagner un dièdre et le remonter pour trouver une plaquette tout en haut de l’arête.
Cà c’est ce que nous aurions dû faire…Le topo étant en allemand nous ne sommes pas complètement sûrs d’avoir bien compris. Je descends un peu trop bas (sous le petit surplomb) et de là, je me laisse attirer par un relais (je comprends très vite mais trop tard que c’est un relais de réchappe…Nous arriverons quand même à rejoindre l’itinéraire mais au prix de maints efforts et de temps perdu…
C’est l’erreur de trop, nous sommes doublés par deux cordées…Mais tellement contents d’avoir pu nous remettre sur le bon chemin et de pouvoir attaquer la longueur en escalade artificielle (A0) de l’arête sommitale.
Oui pour nous ce sera A0 (nous allons tirer sur les dégaines).Car en libre ce serait 7B. Trop dur…
Non sans émotion nous contemplons un membre d’une autre cordée s’y réaliser.
Vers la flamme sommitale
Maintenant le sommet s’offre à nous ainsi qu’une bonne partie du cheminement effectué depuis ce matin. Une dernière mission nous y attend : gravir la flamme sommitale et inscrire nos noms dans le gipfelbuch (le livre du sommet).
Il est 18h : nous sommes au sommet (2981m) après 12 heures d’effort.
Conclusion sur notre ascanesion du Salbitschijen
Une journée très gratifiante : le plaisir de l’escalade, la beauté des lieux, un horaire tenu.
Ajouté à cela un itinéraire splendide, louvoyant sur des tours compactes et passant sur le fil d’arêtes effilées.
Une course annoncée comme étant une des plus belles arêtes des Alpes. Nous ne pouvons que le confirmer.
Un rêve réalisé. Et se dire, après coup, je l’ai fait…oui je l’ai fait. Je l’ai bien fait…
Et j’y ai pris du plaisir !!! Enfin, nous y avons pris du plaisir.
Et se dire aussi, je reviendrai en ces lieux…dans quelques années ou dans quelques mois, …Oui un jour je reviendrai… Oui mais c’était sans compter l’attractivité irrépressible de cet endroit exceptionnel. Impossible de résister plus longtemps…et au moment où j’écris ces quelques lignes, je reviens de l’arête Sud. Magnifique! Une vraie course d’arête sur un rocher au grain d’une rare beauté, jamais difficile tout en étant aérienne avec élégance. Mais c’est sûr elle n’a pas l’ampleur ni l’engagement de son aînée, l’arête Ouest…
Matériel utilisé pour l’ascension du Salbitschijen en Suisse
Vêtements pour l’ascension du Salbitschijen
catégorie | Modèle | Marque | Pourquoi ce choix ? | Satisfait ? | Si c’était à refaire ? |
Pantalon stretch | decathlon | Le prix, la coupe | Très satisfait, en plus il est résistant même en se frottant contre le granit abrasif | Oui, sans hésiter | |
Veste softshell | Super chockstone | Montain Hard Wear | Le poids, la respirabilité | Oui ; Mais attention il n’y a pas de membrane comme dans une windstopper : la protection est donc moindre | Oui, sans hésiter |
Doudoune | Phantom | Montain Hard Wear | Légère et chaude | Oui, même si je ne l’ai pas utilisé. Nous avons grimpé toute la course en tee-shirt | Oui, sans hésiter |
Sac de bivouac( au cas où) | Ultralignt bivy | Cumulus | Le poids (140g), la respirabilité | Satisfait du poids mais encore jamais utilisé | oui |
Matériel escalade pour l’ascension du Salbitschijen
catégorie | Modèle | Marque | Pourquoi ce choix ? | Satisfait ? | Si c’était à refaire ? |
Chaussons d’escalade Chris | Nomad | Madrock | Chausson confortable pour les grandes voies, cuir épais pour coincer dans les fissures, serrage précis | oui | J’essayerai de trouver un modèle similaire mais un peu plus rigide |
Chaussons d’escalade Clément | Katana velcro | La Sportiva | Le confort | Très satisfait | Oui |
Baudrier | Aspect | Black Diamond | Le confort grâce au matelassage | Très satisfait au niveau du dos, | Je rachèterai |
Sac à dos | Summitrocket 30l | Montain Hardwear | Le poids (440g), | Très satisfait, même s’il n’est pas très résistant (2 accrocs sur le côté en me frottant contre le rocher). Mais on ne peut pas tout avoir : le poids et la résistance. | Oui sans hésiter |
Textile autocollant pour la réparation des accrocs sur mon sac à dos | 1m x 5cm | Dacron autocollant | A la base utilisé pour les réparations de cerf volants et voiles de kite surf. Résistant et collant sur les tissus déperlants | Très facile d’emploi. A l’air résistant. Mais un peu déçu de la qualité du collant… | A voir à l’usage … |
Coinceurs | Camalots tailles 0.75-1-2-3 | Black Diamond | La robustesse, la plage d’utilisation. La notoriété Pour cette course ces 4 friends suffisent | Très satisfait. Inconvénient : le prix plus élevé que la concurrence | La qualité se paie. Je rachèterai. |
coinceurs | Wall nuts | DMM | La réputation | oui | Oui sans hésiter |
12 dégaines | Mission light set | Edelrid | Très légères (60 grammes) Le confort de prise en main pour des dégaines de ce poids. | Très satisfait. Mais attention elles sont en alu et s’usent donc plus vite. | Oui sans hésiter |
assureur | Reverso | Petzl | La polyvalence d’utilisation, l’autobloquant pour assurer un second | Très satisfait. Mais s’use vite avec le frottement de la corde | Je rachèterai. |
Mousquetons à verrouillage automatique | Jumbo | Simond | La facilité d’utilisation | Inconvénient : le poids (87 g) | Je chercherai moins lourd |
Corde (rappel de 100m) | Cobra 2 | Beal | La notoriété de la marque. Le prix (acheté en promo) | Très satisfait | Oui sans hésiter |
casque | Scarab | Kong | Le confort, Le poids (255g), la polyvalence (certification escalade, vtt canoë,…) | Très satisfait | Oui sans hésiter |
frontale | Tikka RXP | Petzl | La puissance d’éclairage | Très satisfait ; Un véritable spot | Oui sans hésiter |
Lunettes de soleil | Whoops | Julbo | La qualité du verre. Catégorie 4 | Très bon modèle. La protection est excellente en altitude. Les lunettes tiennent bien et ne glissent pas | Oui sans hésiter |