Tony Lopez, artisan coutelier est bien connu des passionnés du bushcraft, de défense avec en particulier le couteau carcajou imaginé par une autre personnalité du monde de la survie David Manise. Il nous présente son projet d’expédition en Amazonie : Le chemin des Emerillons.
Présentation du projet Onca Expéditions
Onca est une association que j’ai créé avec mon ami Arnaud Paumier. Nous avons fondé cette association à l’occasion du lancement de notre future expédition en Amazonie baptisée « Le chemin des Emerillons » qui débutera début septembre 2020.
Cette expédition a pour but de traverser la Guyane Française d’Ouest en Est en autonomie totale et sans moyen de locomotion motorisés.
Le parcours va se diviser en trois parties, deux parties fluviales qui seront effectuées à l’aide d’un canoë gonflable Gumotex et une partie pédestre. Le tout sur une distance d’environ 500 km en pleine forêt Amazonienne.
Outre le défi sportif que cela représente, notre but premier est de faire découvrir au grand public la forêt Amazonienne Guyanaise avec sa faune, sa flore et certains peuples autochtones.
Pour cela nous avons créé le site internet Onca Expéditions dédié exclusivement à cette expédition où nous présenterons des photos, des vidéos sur notre chaîne YouTube et des retex. Vous pourrez également nous suivre sur notre page Facebook et Instagram.
Qu’est ce que le chemin des émerillons ?
Le mythique Chemin des Emerillons est un sentier historique. Il a été parcouru pendant des siècles par les amérindiens Teko, Wayampi et Wayana pour des échanges commerciaux et culturels. Rendu célèbre par l’explorateur Raymond Maufrais dont seuls les carnets de voyage ont été retrouvés sur cet itinéraire.
Le Chemin des Émerillons joint les bassins versants du Maroni et de l’Oyapock, traversant la Guyane d’Ouest en Est.
Les participants à cette expédition en Guyane
Nous sommes deux participants pour réaliser cette expédition en Amazonie, mon ami Arnaud Paumier et moi-même.
Arnaud et moi, nous nous connaissons depuis plus de 15 ans et nous pratiquons des sports de combats ensemble. Nous connaissons donc parfaitement nos compétences sportives mutuelles.
C’est moi qui ai eu l’idée de ce projet. Je voulais réaliser une expédition sympa en forêt Amazonienne pour mes 40 ans, alors j’ai donc eu l’idée de traverser la Guyane Française d’Ouest en Est sans moyen de locomotion motorisés et en autonomie complète.
Mais pour mener à bien cette expédition, il me fallait un binôme avec une bonne condition physique, un gros mental, qui aime ce type de défit et surtout avec qui je m’entend très bien. J’ai donc décidé de contacter Arnaud pour lui proposer le projet et il m’a répondu positivement tout de suite.
Dans l’équipe, nous avons également un ami médecin que nous pouvons joindre en métropole par téléphone satellite H24 et 7 jours sur 7.
Pourquoi l’Amazonie ?
Je trouve cette forêt d’une richesse extraordinaire de par sa faune, sa flore et les peuples autochtones qui y vivent. La première fois que j’ai posé le pied en jungle, je me suis trouvé tout petit face à « mère nature ». Il y règne une ambiance particulière due à plusieurs facteurs : la chaleur, le taux d’humidité, les odeurs, les bruits, les insectes, les serpents, les singes, les oiseaux, etc…
Pour résumer, j’adore l’Amazonie.
De l’expérience du terrain …. pour préparer une expédition en Amazonie
Je suis passionné de la forêt Amazonienne depuis que je suis enfant. J’ai lu énormément de livres et regardé beaucoup de reportages sur ce sujet.
Mais la théorie ne remplace pas le terrain…
En 2009 j’ai eu l’opportunité de partir faire un trek pour la première fois en forêt Amazonienne Guyanaise avec mon ami Eric Haffray.
Eric est un vétéran des forces spéciales de l’armée Française (20 ans au 1er RPIMA à Bayonne), c’est un grand spécialiste de ce biotope. Il m’a pratiquement tout appris sur la jungle, pour savoir comment y vivre et comment y survivre. J’ai appris à me déplacer, à m’orienter, à reconnaitre la faune et la flore, à chasser et conserver mon gibier, à fabriquer un carbet de fortune, un lit jungle, un boucan, etc…
Nous sommes aujourd’hui en 2020 et depuis 2009 j’ai eu l’occasion d’y aller plusieurs fois pour améliorer mes connaissances.
Arnaud a été pour la première fois en Amazonie en 2019. C’est un habitué des treks engagés qu’il a effectué dans différents lieux dont le Népal et la Laponie pour ne citer que ces deux exemples.
Nous partons sans guide et serons deux à effectuer cette expédition du point A au point B.
Depuis combien de temps préparez-vous cette expédition en Guyane ?
Cela fait environ 1 an et demi que nous préparons cette expédition en Amazonie.
En septembre 2019, nous avons effectué un trek de reconnaissance pour tester certains équipements et je voulais également que Arnaud « goûte » à la jungle une première fois avant d’y passer 50 jours en autonomie complète.
Rencontrez vous des problèmes d’organisations et de logistiques ?
Non pas vraiment. Mais pour dire la vérité, à notre niveau, un an et demi de préparation pour cette expédition n’a pas été du luxe. Il nous a fallu du temps pour analyser les parcours, sélectionner et acquérir les équipements, rechercher des sponsors et des partenaires et organiser le trek de reconnaissance en septembre 2019.
Combien de temps est prévu cette expédition?
Nous allons passer plus ou moins 50 jours dans « Les Grands Bois ».
Nous avons estimé à environ 40 jours pour l’expédition du point A à l’Ouest au point B à l’Est et nous allons également passer plusieurs jours dans un village Amérindien ou un chef Wayana nous a invité.
Le départ se fera début septembre 2020 pour se terminer fin octobre 2020.
Comment êtes vous préparés pour cette expédition tant physiquement que psychologiquement ?
De mon côté, j’ai un entrainement physique assez régulier tout au long de l’année.
Je m’entraine le lundi, mardi, jeudi et vendredi (le mercredi est mon jour de repos). Je fais une séance de renforcement musculaire avec barres, haltères et poids de corps plus une séance de cardio (vélo ou course à pied).
Le soir, je fais également une séance d’étirements avant de me coucher.
Le samedi ou le dimanche, je fais une séance de marche avec un sac à dos ou un chariot de trek.
De son côté, Arnaud s’entraine également à un rythme très régulier.
Nous essayons également de caler des sorties en canoë pour améliorer notre technique de navigation en binôme.
Psychologiquement, nous sommes tous les 2 des personnes avec une grosse volonté et surtout nous sommes des passionnés.
Avez vous des points d’interrogations à ce projet ?
Quand il y a un doute, c’est qu’il n’y a pas de doute…
Nous n’avons pas vraiment d’interrogations particulières.
La question de savoir si nous allons réussir ne se pose même pas car mentalement nous sommes verrouillés pour aller jusqu’au bout.
Maintenant seul l’avenir nous le dira, mais c’est vraiment important de partir avec cette volonté positive de réussir.
Quels sont les principaux dangers à cette expédition amazonienne ?
Comme toute expédition engagée, il y a certains paramètres à prendre en compte pour éviter de se mettre dans une situation à risque. Le risque zéro n’existe pas, même si l’expédition en Amazonie est correctement préparée.
Je dirai que si tu essayes d’avoir une rigueur le plus constant possible, tu peux déjà éviter pas mal de problèmes.
Comment allez vous gérer votre nourriture ?
Nous avons fait le choix de préparer nos repas nous-mêmes et de tout mettre sous vide.
D’un point de vu calories et prix, c’est plutôt très intéressant par rapport à des sachets lyophilisés industriels.
Nous avons choisi soigneusement tous les aliments pour avoir un maximum de calorie par rapport au poids et au volume (le poids est notre ennemi numéro un pour la partie pédestre).
Tous nos repas sont conditionnés sous vide. Ce type de conditionnement et un vrai plus pour la conservation des aliments dans ce biotope qui possède un taux d’humidité très important sous une chaleur respectable. Tous nos aliments sont faciles et rapides à cuisiner car après des grosses journées d’effort tu n’as pas forcément la motivation de passer une heure à préparer un repas.
Nous avons d’autres priorités plus importantes comme par exemple :
- reconditionner notre équipement
- établir un nouveau lieu de bivouac
- avoir une hygiène parfaite
- soigner les petits bobos
- et pour finir, dormir pour être à nouveau d’attaque pour le lendemain.
Quel est votre équipent pour l’Amazonie ?
Nos vêtements et chaussures pour cette aventure en Amazonie
Pour les parties fluviales j’ai :
- un chapeau à large bord
- une chemise légère et ample
- un pantalon
- une paire de chaussures de sport
- une paire de chaussettes
- des lunettes de soleil
- des mitaines
- un gilet de flottaison.
Pour la partie pédestre j’ai :
- une casquette
- le même pantalon
- une chemise plus épaisse (pour se protéger de certaines épines dû à la végétation)
- une paire de chaussures montantes
- un cuissard de running (sous le pantalon pour éviter les échauffements sur les cuisses)
- une paire de chaussettes hautes
- une paire de guêtres adaptées aux morsures de serpents
- et une paire de gants
Pour le portage et rangement
Plusieurs types de sacs étanches de chez HPA et 2 sacs à dos Berghaus.
Pour manger et boire
Pour le duo:
- 2 cuillères à long manche en titane
- 2 bols en titane
- 1 popote en titane
- 2 tasses pliante
- 1 réchaud multi combustible
- un filtre à eau principal MSR Guardian
- un filtre à eau en back up de chez Sawyer
- une grille de cuisson ultra light pliante.
Pour dormir
Nous aurons chacun:
- un hamac avec moustiquaire
- un tarp
- une couverture de survie Grabber de couleur vive
- un poncho liner
- des vêtements de nuit (1 pantalon large et light, 1 paire de chaussettes haute en laine de mérinos, 1 t-shirt à manches longues et 1 coupe-vent).
Trousse à pharmacie pour une expédition en Amazonie
Voici le contenu de notre trousse à pharmacie :
- scalpel + lames
- lampe
- épingle
- lunettes
- pince à épiler
- pince à tiques
- feutre noir
- aiguille pneumothorax
- gants en nitrile
- compresses
- ciseaux
- canule nasopharyngé
- agrafeuse chirurgicale
- pince à agrafes
- thermomètre
- tape d’électricien
- Biseptine
- Bétadine buccale
- bande Velpeau
- bande élastique
- Elastoplast
- Ziploc
- seringue + aiguille
- sérum physiologique
- collyre
- pommade anti mycosique.
Nous avons également plusieurs types de médicaments pour les douleurs diverses :
- diarrhée
- constipation
- antibiotiques
- antihistaminiques.
Nous avons également 2 « Trauma Kit » identique, voici le contenu :
- garrot tourniquet CAT
- pansement compressif Israélien
- wound packing
- bande Velpeau
- gants en nitrile
- couverture de survie
- lampe frontale
- feutre noir
- ciseaux
- tape
- aiguille pneumothorax
- pansement occlusif
- Epipen (2 par personne).
Nous avons suivi plusieurs formations dans ce domaine pour être un minimum opérationnel sur le terrain.
Comment allez vous vous orienter et communiquer ?
Nous avons :
- 2 boussoles
- des cartes IGN
- 2 GPS dont 1 en back-up
- 1 téléphone satellite Iridium 9575 Extreme
En amont nous avons étudier très précisément le trajet à l’aide de nos cartes et sur internet. Nous avons également répertorié tous les sauts que nous allons rencontrer sur les parties fluviales.
Nous avons choisi un canoë gonflable de chez Gumotex et pour être plus précis, le modèle Scout Standard.
Ce canoë est un vrai plus pour nous durant la phase pédestre qui va se dérouler sur environ 11 jours de marche et où nous devons transporter tout notre équipement.
Armement et outils
Nous partons avec 2 fusils Baïkal mono coup en calibre 12/76 et 1 scie à élaguer Bahco
Pour la partie coutellerie je pars avec:
- une machette custom Amazon Jungle
- un multitool Victorinox
- un neck knife Eklipse (une de mes collaborations avec Armes Bastille)
- mon Bowie F136
Pourquoi ce choix? et comment l’avez vous sélectionnés?
Il nous faut un minimum d’outils de navigation en plus des cartes IGN (celles-ci ne sont pas très précisent pour cette zone géographique).
Pour le choix de la sélection, nous sommes assez à jour sur ce qu’il se fabrique en ce moment et avons testé de nombreux équipements depuis le temps que nous faisons des treks chacun de notre côté.
Comme pour tout équipement, nous avons appliqué la règle de mon ami Eric Haffray, c’est-à-dire : PVEPP :
- Poids
- Volume
- Efficacité
- Praticité
- Prix
Cela n’est pas toujours évident de réunir tous les paramètres, mais nous essayons de faire au mieux par rapport à nos besoins.
Quel conseil donnerais tu à ceux qui veulent s’aventurer en Amazonie ?
Le mieux y d’y aller au moins une première fois avec une personne qui connais un minimum ce biotope pour éviter les petits soucis divers et variés qui peuvent nous faire basculer dans une situation très critique.
La frontière entre le « tout va bien, c’est cool » et le « tout va mal, c’est la merde » est très mince. Lors d’un de mes treks en Guyane, j’ai franchi une fois cette frontière et cela a été très limite pour mon matricule, mais cela est une autre histoire…
S’adapter à son environnement ou à une situation de survie ne veut pas dire qu’il faut laisser place à une totale improvisation.
« Le hasard ne favorise que les esprits préparés »
Louis Pasteur
Quel est le coût d’une telle expédition en amazonie ?
Le coût une d’une telle expédition en Amazonie est proche des 35 000 €.
Nous avons la chance d’avoir quelques sponsors équipementiers qui nous ont permis de baisser les frais.
Pour baisser encore les frais, nous avons prévu une zone « dons » sur notre site internet (merci aux personnes qui ont déjà fait des dons) et nous allons également bientôt mettre en place et proposer notre expédition sur le site de financement participatif Ulule.
La recherche des sponsors nous a donné l’occasion de découvrir et de rencontrer des personnes très sympathiques.
Je profite de cet interview pour tous les remercier et de nous avoir fait confiance en nous suivant dans cette grande aventure.
Merci à :
Gumotex, Armes Bastille, Fallon Cuir, HPA, Azimut Nature, Satavenue, l’association « des amis d’Edgar et de Raymond Maufrais », Akrone, Eric Haffray, Marie-José Maître, Charles Honoré, Jessica Horn, Stany Coppet, Aïmawalé Opoya et le parc Amazonien de Guyane.
Un grand merci également à Mike Horn qui est le parrain de notre expédition.
Pour conclure voici une citation
« Fais de ta vie un rêve, et d’un rêve, une réalité »
d’Antoine de Saint Exupéry
3 commentaires
🤔🤦♂️À croire que c’est à la mode depuis 2018…
50j de traversée, 35000€ d’investissement, suréquipements, 1an et demi de prépa, et entraînement intensif….
Là aussi, je m’interroge 🤔 sur toute cette organisation.
Cette traversée n’est qu’un exploit pour ceux qui ne sont jamais venus en Guyane. Et ce parcours est loin d’être représentatif de l’Amazonie. L’Amazonie est bien plus difficile à parcourir.
Parcours fait en Mars/Avril 2019, sur 31j, en solitaire, sans transport motorisé, sans boussole ni GPS.
Bonjour BORDE,
Je pense pas que ce soi un phénomène de mode. Bien au contraire il faut favoriser ce type de découverte.
la Guyane est tellement belle et agréable.
Si tu pratique le trek en Amazonie tu n’es pas sans savoir que chaque parcours est différent. A pied ou en courant, en autonomie ou en chassant, seul ou en groupe, saison sèche ou humide, La durée est à prendre en compte. Une préparation oui lorsque l’on vient de métropole avec un climat tempéré, oui pour la marche type montagne avec charge, oui pour le mental. Nous ne pouvons pas nous permettre de juger ce trek.
Félicitation pour ton parcours sans moyen d’orientation. Tu devrais faire un retour d’expérience publique comme Elliot SHONFELD. Je suis sur que tu as plein de choses à nous raconter.
Bonjour,
A la mode depuis 2018, pourquoi ?
Personne n’a parlé d’entraînement intensif et d’exploit. Nous sommes juste 2 potes qui fond une petite expé en Guyane pour se faire plaisir avant tout,
Concernant l’orientation, nous ne sommes pas assez bons pour partir sans boussole et sans gps.
Si cela n’est pas indiscret quel parcours avez vous effectué en Mars/Avril 2019 ?
Cordialement,
Tony