Francis BALLI nous partage sa lune de miel autour du monde en vélo
Information pour préparer une Lune de miel autour du monde
Lieu
D’Europe en Amérique en passant par l’Asie et l’Océanie, une odyssée cyclotouristique de Bourriquette et Bourriquet
Où et quand ?
Contraintes professionnelles, impératifs de météo, envies d’aventure, visas… Difficile de concilier tout ça dans le bon planning, la bonne date pour programmer les différentes étapes de notre année sabbatique!
Départ dans le Doubs
Avec Saint-Petersbourg en premier point de mire, le paramètre météo est particulièrement important, mais nous devons faire un compromis avec nos dates de fin de travail. C’est donc le 5 septembre 2012 que nous poussons notre premier coup de pédale dans le Doubs, en direction de l’est, et passons la frontière suisse. La neige étant tombée fin octobre en Finlande, c’est sous un manteau blanc que nous arrivons le 3 novembre dans la ville de Pierre-le-Grand. Timing un peu juste, il a fait bien froid sur les dernières semaines…
Direction le Transsibérien
Nous quittons alors nos fripes de cyclos pour revêtir celles de touristes, et prenons le transsibérien, un vieux rêve. Et c’est en effet comme dans un rêve que nous traversons les steppes sibériennes et mongoles, figées par le froid de novembre, voyage que nous agrémentons de petites pauses à Moscou, Irkoutsk et le lac Baïkal, Oulan-Oudé et Oulan-Bator. Après une petite halte à Pékin mi-décembre, nous reprenons un train vers la chaleur du Yunnan et redémarrons le cyclotourisme.
Noël au Vietnam
Nous passons Noël à Sapa, au nord du Vietnam, puis le 1er janvier 2013 dans la baie d’Halong, traversons le Cambodge pendant la saison sèche et nous arrêtons à Bangkok début février.
Nouvelle-Zélande
Nous sommes aux antipodes de la France, autant en profiter pour rouler en Nouvelle-Zélande! Nous sillonnons donc le pays de Bilbo en février et mars. Alors que tout le monde nous promet de la pluie en cette fin d’été austral, nous profiterons d’une météo exceptionnellement clémente.
Amérique du Sud
1er avril, sans blague, nous commençons à Lima une période de 3 mois dans les Andes. L’Amérique du Sud sera notre coup de cœur, chaque jour plus magique que le précédent. Les Andes péruviennes sauvages, Cusco, le lac Titicaca, La Paz et ses randonnées exceptionnelles, l’altiplano, le Salar de Uyuni, le Lipez, San Pedro de Atacama… Aujourd’hui encore l’évocation de ces noms nous laisse rêveurs. Nous connaîtrons une période de chaleur en traversant l’Argentine de Jujuy à Cafayate, mais à partir de là le mois de juin nous piège presque dans les rigueurs de l’hiver. C’est donc avec soulagement que nous arrivons à Santiago du Chili, après une mémorable dernière traversée des Andes depuis Uspallata.
Madrid-Les Fourgs (de là où nous sommes partis) sont nos vacances : l’Espagne, le sud-ouest, le Tarn, l’Ardèche, le Jura, tout cela en juillet, c’est la belle vie tous les jours!
Participants
Tout a commencé il y a bien longtemps, avec une simple carte du monde. Les yeux brillants, séparés par des centaines de kilomètres, deux enfants qui ne se connaissaient pas suivaient au même moment une ligne imaginaire traversant des pays aux noms emplis de mystère. Ils ne savaient pas qu’ils allaient vivre quelques années plus tard un rêve commun un peu fou, celui d’un tour du monde à vélo.
Nous les retrouvons en 2010, toujours passionnés de voyage avec le virus du cyclotourisme en eux, Claire en robe blanche et Francis en costume 3 pièces, mappemonde dans la main. Aujourd’hui ils se marient, et c’est sûr, leur lune de miel s’éternisera pendant un an, dans un hôtel qui comptera autant d’étoiles que le ciel qui leur servira de toit tous les soirs!
Et Bourriquette et Bourriquet, dans tout ça? Leurs fidèles montures, évidemment! Alors, prêts à nous suivre pour une aventure par monts et par vaux?
Comment s’orienter, préparer son itinéraire ?
Ah les cartes! Ce par quoi tout arrive, ce qui donne libre cours à notre imagination débordante! Ces petits hiéroglyphes qui se donnent des allures de codes pour initiés nous attirent comme des aimants. Voici donc une petite liste de ce que nous avons utilisé pour nous orienter et choisir nos routes.
Europe
- France : un iPad avec l’appli Atlas Michelin…
- Suisse : nous avons imprimé quelques cartes depuis le site veloland.ch, sorte de geoportail pour cyclistes extrêmement bien fait.
- Danube : plusieurs guides de l’eurovélo6 existent. Nous avons utilisé la collection Danube Bike Trail (1, 2 et 3) jusqu’à Budapest, bien précis avec des conseils avisé
- Europe de l’est et du nord : 2 cartes Michelin au 1/300000 pour la Pologne (tout juste assez précis), une générale des Etats baltes au 1/500000 (Michelin également), et une de Finlande au 1/500000 (Freytag&Berndt) bien suffisante. Cette dernière nous a aussi servi pour le trajet en Russie jusqu’à Saint-Petersbourg (peu précise mais suffisante également). La ville d’Helsinki fournit des cartes spéciales pour les voies cyclables de la ville et des alentours, il suffit de demander aux offices de tourisme.
- Espagne : en cherchant une carte, on nous a donné un atlas de 2008 (bien assez précis pour du cyclotourisme) de l’ensemble de l’Espagne, édité par le ministère du dé
Asie
- Chine : la principale compagnie de cartes chinoise édite des atlas de chaque province. Nous en avons trouvé un spécifique au Yunnan avec des cartes en différentes échelles, des plans de ville, en chinois, et avons traduit les noms des grandes villes en alphabet latin avant de partir. Avoir un atlas en chinois permettait de situer les directions indiquées par les panneaux, et accessoirement de demander notre chemin en pointant du doigt le nom de la ville.
- Vietnam : excellent atlas au 1/500000, édité par Narenca (Vietnam Publishing House of Natural Resources, Environment and Cartogrphy), avec des plans de villes. Disponible dans à la librairie Bookworm de Hanoï.
- Cambodge : à Ban-Lung, nous avons trouvé une carte au 1/750000 (assez facilement disponible dans les villes), visiblement imprimée d’internet (éditée par Gecko Maps) mais relativement précise, avec les plans de Phom Penh et Siem Reap. Il existe aussi des cartes militaires encore plus détaillées, mais nous n’avons pas jugé utile d’avoir ce niveau de pré
- Thaïlande : nous nous sommes arrêtés à la première station essence et avons trouvé toutes sortes de cartes routières, il n’y a qu’à faire son choix! Nous avons aussi acheté une carte spécifiquement pour Bangkok, bien utile pour cette mégapole tentaculaire… qu’a posteriori nous ne recommandons absolument pas de traverser à vélo! Les transports en commun sont bien développés, autant les utiliser, question de sécurité routière…
Océanie
- Nouvelle-Zélande : nous avons opté pour une carte au 1/800000 qui suffisait. En outre, nous avons acheté les Pedaller’s Paradise. Ce sont des guides-roadbooks un peu artisanaux édités à compte d’auteur par Nigel Rushton. Leur utilité est controversée, la structure du guide semble anarchique au premier abord, mais une fois que l’on s’est mis dedans, ils nous ont été d’une aide fabuleuse. Seul regret, il n’y a pas de classement des itinéraires par ordre d’intérêt, donc ils ne règle pas la difficulté du choix de parcours! Vous pouvez avoir des informations sur paradise-press.co.nz.
Amérique du Sud
- Pérou : un atlas excellent, le Guia Toyota. Une mine d’information, réédité tous les ans, une bonne précision, c’est vraiment la meilleure option que nous ayons vue, et nos comparaisons avec d’autres cyclos nous ont confortés en ce sens. En plus, le pays développe son réseau routier tellement vite que vous aurez souvent la bonne surprise de rencontrer un revêtement meilleur que celui indiqué dans le guide. Il est disponible dans toutes les librairies, on peut même l’acheter en ligne. Le site panamerica.ch permet en outre d’avoir les dénivelés des routes empruntées (très judicieux dans les Andes).
- Bolivie : nous avons utilisé la très bonne carte générale « The Andes », aux éditions Nelles (les couvertures jaunes) au 1/4500000. Cela parait une échelle inadaptée, mais en réalité la carte contient un nombre impressionnant d’information. Nous l’avons utilisée pendant tout notre parcours (qui suivait les Andes…). Pour le Salar de Uyuni, nous avons pris une carte spéciale achetée à La Paz (vendue dans toutes les petites boutiques de souvenirs) : « Rutas Salar de Uyuni, FOV » (couverture noire, pliée elle mesure 8cm sur 25 environ… difficile de la décrire plus précisément). Cette dernière est vraiment un must, elle présente le Salar et le Lipez au 1/100000 et donne de précieuses indications sur l’environnement, la planification, l’accès, les possibles étapes, les choses à voir, etc…
- Argentine et Chili : en plus de la carte « The Andes » citée précédemment, nous avons utilisé plusieurs cartes différentes, toutes se valant à peu prè Les suivantes étaient cependant plus précises: « Rutas de la Argentina » de AutoMapa au 1/2000000, et « Argentinien », en allemand, de Reise Know-how, au 1/2000000.
Pour les villes : nous nous sommes procurés des cartes des grandes villes, parfois incluses dans les cartes ou atlas routiers que nous avons utilisé Vilnius, Saint-Petersbourg (vraiment nécessaire vu la taille de la ville, nous en avons trouvé une en Finlande au 1/30000), Helsinki, Bangkok, Kunming, La Paz, Lima, …
Quoi d’autres dans les environs
Vous avez la possibilité de pratiquer d’autres activités notamment en passant par la Sibérie: Alpinisme au Pic de Coupole.
Bibliographie
Nous avons aussi utilisé quelques guides de voyage :
- Routard Pologne (complètement inutile),
- Les guides de voyage Lonely Planet « Vietnam, Cambodia, Laos & Northern Thailand » (parfait), Argentine (très bien)
- Lonely Planet en version informatique pour l’Amérique du sud et le Transsibérien (extrêmement utile).
- Lien Internet
Le site www.mapmyride.com permet de choisir des routes et d’afficher le profil. Nous l’avons utilisé pour planifier (très utile) et également pour enregistrer nos parcours. Très ergonomique, il s’est révélé d’une grande aide.
Enfin, nous avons utilisé une application gratuite sur iPad très pratique, MapsWithMe. Cela nous permettait de télécharger les cartes des pays ou des zones que nous voulions (toujours gratuitement), puis de les consulter hors ligne. Sans doute à peine moins précises que des cartes papier, elles ont néanmoins le mérite de donner les plans de ville (avec noms des rues!), quelques infos sur les commerces, et surtout de ne pas peser lourd!
Pour lire le récit de notre aventure, nous vous conseillons d’ouvrir GoogleEarth et de télécharger notre itinéraire à l’adresse suivante : cliquez ici
Où dormir durant un tour du monde?
L’un des paragraphes du récit traite en partie de cette question, mais je peux vous dire dès à présent que notre mode d’hébergement principal était la tente. Assez facile en Europe, en Chine et au Cambodge, un régal en Amérique du Sud, nous l’avons cependant évité dans les zones urbaines. C’est donc quasiment impossible le long de la highway 1 au Vietnam et sur la route thaïlandaise Poipet-Bangkok. Lorsque nous choisissions un endroit, nous avons toujours essayé de demander à une ferme ou à une maison. Ou alors nous nous cachions un peu. Nous n’avons jamais eu de mauvaise rencontre, peut-être parce que nous passions beaucoup de temps à choisir un endroit convenable (un peu caché mai pas trop loin des habitations, juste en cas de besoin). Toquer à la porte est une alternative qui résulte souvent en un refus, mais le peu de fois où ça marche vaut vraiment tous les « non » du monde! Nous avons fait des rencontres exceptionnelles grâce à cette méthode. Le climat froid aide beaucoup à être pris en sympathie…
Au Vietnam il est préférable d’aller dans des guesthouses (très peu chères) car le pays est très urbanisé autour des axes routiers. Au Pérou nous n’avons pas campé car chaque village possède son « hospedaje » (« alojamiento » en Bolivie : tous deux signifient « auberge », mais les deux peuples ne se comprennent pas mutuellement sur ces termes… une surprise de taille lors du passage d’un pays à l’autre!), mais le terrain s’y prête cependant à merveille.
En Nouvelle-Zélande
La Nouvelle-Zélande est le pays du tourisme organisé autour du voyage motorisé. Ce n’est donc absolument pas un paradis pour les cyclo-campeurs que nous sommes! Il faut donc bien faire attention aux panneaux d’interdiction sous peine d’amende (les camping-car « self-contained » – comprendre « avec toilettes » – sont le plus souvent autorisés, mais pas les tentes… on nous reparlera d’écologie, après ça!). Une autre solution consiste en l’utilisation des campings du DoC (Department of Conervation) : payants mais minimalistes, ils peuvent être un point de camping obligatoire dans certaines zones.
avec l’aide des réseaux
Enfin nous avons utilisé deux réseaux, Warmshowers et dans une moindre mesure Couchsurfing. Les deux systèmes reposent sur un accueil volontaire des membres qui en font la demande à d’autres membres. Chacun est libre de refuser sans justification, il n’y a aucune obligation à rien. Le principe est très altruiste, simplissime, et fonctionne à merveille. Warmshowers est un réseau spécifiquement dédié aux cyclistes qui veulent accueillir ou se faire héberger par d’autres cyclistes. Cela fait donc un point commun qui rapproche d’emblée, et nous ne regrettons pas d’avoir sollicité les membres de ce réseau. Cela fonctionne exceptionnellement bien en Nouvelle-Zélande, assez bien en Europe, mais très peu en Asie et en Amérique du Sud (le réseau y est beaucoup moins développé). Aujourd’hui c’est à notre tour de nous enrichir des personnes qui désirent passer une nuit ou deux chez nous.
Où se restaurer ?
Là encore l’un des paragraphes du récit revient sur cet aspect du voyage. Mais juste un mot pour souligner que nous avons dégusté nos meilleurs plats sur la route, sans distinction du pays! Les plats des petites échoppes sur le bord du chemin ont toujours une saveur d’aventure particulière… Ce qui est sûr, c’est que mis à part dans les endroits désertiques (Uyuni, Cambodge, Lipez), il est toujours possible de se ravitailler à la journée. Il est donc inutile d’emporter trop de poids en nourriture… sauf si l’on veut agrémenter ses propres repas de nombreux produits trouvés sur place!
Les visas pour un tour du monde en vélo
Avant de partir, le problème des visas semblait pour nous être la principale source de soucis. Après coup, nous nous apercevons que ce n’est qu’une histoire d’argent, et qu’il n’y a pas de raison de se voir refuser un visa.
Nous avons voulu obtenir les visas russe et vietnamien en avance. Pour le premier, nous voulions bénéficier d’une allonge de temps grâce à une invitation de notre famille à Saint-Petersbourg (45 jours au lieu de 30), et les démarches se sont révélées être très compliquées. Au final, il semble préférable de passer par une agence (comme action-visas, par exemple), quitte à payer un peu plus et prolonger la validité sur place. Le visa vietnamien est au contraire très simple à obtenir par la poste.
Nous avons fait réaliser le visa chinois au consulat de Saint-Petersbourg. Après avoir essayé sans succès de faire les démarches nous-mêmes, nous sommes passés par une agence (Travel Asia, [email protected]) et tout s’est passé sans problème. Nous avons obtenu le visa mongol au consulat d’Irkoutsk en 2 jours.
Une règle importante que nous avons pu découvrir : il est toujours extrêmement simple d’obtenir le visa auprès d’un consulat proche de la frontière du pays concerné.
Pour les autres pays, nous avons bénéficié des excellentes relations diplomatiques françaises, qui permettent à tous ses ressortissants d’obtenir directement aux frontières des visas sans aucun justificatif dans la majorité du monde.
Sites web
Notre site : http://freesailor.free.fr
www.veloland.ch
www.warmshowers.org
www.couchsurfing.org
www.mapmyride.com
www.panamerica.ch
Pour utiliser les trains en Russie : www.seat61.com/Trans-Siberian.htm
Pour les bus en Russie, www.avtovokzaly.ru
Les transports en Chine : www.chinatrainuide.com, incluant les horaires de bus.
Lune de miel autour du monde en vélo
Introduction
Une lune de miel, c’est un voyage qui compte pour la vie, une expérience unique qui unit pour toujours, n’est-ce pas? Alors que font les jeunes mariés? Ils choisissent d’abord un moyen de transport qui sort de l’ordinaire, voyagent en première classe. Et puis une fois sur place, c’est hébergement tout confort avec piscine, restaurant gastronomique, et séjour où se mêlent activités aventures et farniente.
Et bien le cyclotourisme c’est tout ça à la fois, démultiplié dans la durée et l’intensité! L’histoire que je vais vous raconter est un recueil d’anecdotes non chronologiques, dont le but est de vous le démontrer, et la seule ambition de vous faire rêver un peu tout en partageant quelques informations qui nous ont été utiles.
Cet article peut vous servir pour choisir vos vetements pour un tour du monde si vous ne savez pas trop quoi prendre avec vous.
Vous pouvez ouvrir une petite fenêtre GoogleEarth avec notre itinéraire si vous envisagez d’utiliser ces informations pour planifier votre voyage, ce sera plus facile de suivre ce récit volontairement décousu!
Un voyage en première classe
Pour nous la première classe consiste avant tout en une selle exceptionnelle et un guidon papillon montés sur nos fidèles Bourriques! Nos vaillantes montures mèneront à bien leur mission pas si facile, celle de tenir un an sans casse critique, en supportant le poids de leur chargement dans des environnements parfois bien difficiles. Cette robustesse nous la devons à une bonne sélection du matériel en amont, de bons conseils de la part de notre vélociste, et bien sûr une bonne part de chance. Pour en savoir plus, reportez-vous à la section matériel.
En tout cas au bout de 18 000 km dont une bonne partie sur des routes en tôle ondulée, toujours pas de compotée d’arrière-train, ni de poignets vrillés! C’est dire le niveau de confort dans lequel nous avons voyagé. Auriez-vous besoin d’étirer un peu vos jambes (exercice parfois nécessaire, s’il est besoin de le rappeler…)?
Ne vous tracassez pas à chercher une bonne position sans gêner le passager devant vous, il suffit de poser votre vélo et de profiter des étendues de nature qui s’offrent à vous à perte de vue!
Lune de miel en Amérique du Sud
Et quid des hôtesses aux petits soins… Nous sommes depuis quelques jours au Pérou, déjà sous le charme. C’est notre premier franchissement des Andes, et plutôt que de longer la mer jusqu’au sud, nous décidons d’attaquer directement une montée mémorable qui nous mènera en deux jours de Lima à La Oroya par la Carretera Central. Après environ 35km pour sortir de Lima et de son agglomération (c’est long, la circulation est dense…), nous continuons de monter graduellement. Au moins la route ne redescend-t-elle jamais, ainsi chaque coup de pédale nous élève de quelques centimètres. Nous nous arrêtons à San Matteo, 3800m, un peu cuits, où nous nous refaisons une santé dans une sorte de relais routier.
Le col Anticona 4818m à vélo
Le lendemain, nous partons à l’assaut du col Anticona, 4818m. La route est impeccable mais raide… Comme hier le gradient est très régulier. À l’instar des camions haletants, tous capots ouverts, nous cherchons un peu d’oxygène pour abreuver nos muscles légèrement asphyxiés et pas du tout acclimatés! Les conducteurs nous klaxonnent amicalement en faisant de larges détours, une constante péruvienne extrêmement appréciable quelle que soit la route. L’arrivée au col est jubilatoire : 4818 m, plus haut que notre Mont-Blanc national, nous avons réussi!
Nous attaquons la descente sur La Oroya, continuons le lendemain le long d’un fleuve dans un décor minéral, s’arrêtant occasionnellement pour se faire offrir de l’Inca Cola. À Jauja, un pick-up nous dépasse en klaxonnant, et au virage suivant nous le voyons arrêté, le conducteur est descendu et agite un truc en criant « naranja! »… Nous discutons seulement trois minutes, il nous explique qu’il a accompagné deux Français en Patagonie il y a deux ans, puis il repart sans plus de chichi en nous laissant 2kg d’oranges… Choc avec la générosité sud-américaine, le premier d’une longue série…
Alors, pas exceptionnels les stewards?
Savoir bricoler avant de partir en Lune de miel
Entre-temps, Claire a explosé son pneu arrière sur un morceau de verre, une déchirure de 3cm de long. Après avoir paniqué, râlé, pensé qu’on n’arriverait jamais à une ville… bref, après avoir été insupportable, je trouve un assemblage serflex/scotch peu orthodoxe qui tient jusqu’à Concepcion. Il y a des magasins de vélos, ouf! J’en avise un où pendent des centaines de boyaux de toutes sortes, mais le type me répond qu’il ne peut pas m’en vendre car il n’a pas de qualité équivalente en stock. Au début je crois avoir mal compris, et je dois lui expliquer une vingtaine de minutes que je m’en fous, je veux juste un pneu, jusqu’à ce que j’aille moi-même en décrocher un bien cranté. Claire finira donc en style tracteur, bien utile dans les ripios boliviens et argentins!
Détail d’importance à ce sujet, la taille des roues. Nous avons choisi du 26″ pour son caractère standard, et cette ligne de notre cahier des charges initial a éliminé d’emblée beaucoup de vélocistes. Bien nous en a pris car après avoir discuté avec beaucoup de cyclos croisés en chemin, nous avons réalisé que ce choix permet de trouver partout des pièces de rechanges adaptées (pneus, chambres à air, rayons,…), au contraire des autres dimensions.
Toujours au Pérou
cela fait maintenant plusieurs jours que nous enchaînons les journées de 100 km et plus, avec environ 1500 m de dénivelé positif et négatif quotidien. Nous sommes sur la route Ayacucho-Cuzco, et le moins qu’on puisse dire c’est qu’elle est difficile : nombreux travaux (attention à se renseigner en amont, dans certains cas la DDE locale ferme la circulation complètement et ne l’ouvre que quelques heures par jour…), pistes de terre, cailloux, pentes raides. Mais comme le dit l’adage cyclotouristique, plus c’est dur plus c’est beau, et les paysages récompensent nos efforts au centuple.
Nous passons un dernier col après Abancaye et redescendons pour la première fois à moins de 2000m d’altitude. Autant dire que dans la vallée du Rio Apurimac la chaleur est torride. Une petite échoppe nous permet de nous rafraîchir de fruits et de glaces maisons puis d’attaquer le faux-plat montant à Limatambo, un jour avant Cusco. Ça devient terrible : plein cagnard, route défoncée… Je m’arrête à l’ombre en attendant Claire. De l’autre côté de la route, quelques agriculteurs font leur pause avec leurs familles sous des parasols.
« Quieres uno vaso? »
en me tendant un verre d’une mixture à base de bière et de fruits fermentés. Ça fait bien longtemps que j’ai perdu bien au fond de ma mémoire tous les « tu feras attention à l’eau que tu bois », et j’engloutis le breuvage frais. Même punition pour Claire qui arrive, nous repartons en dessinant de jolis motifs en zigzag sur le revêtement, qui lui est toujours bien occupé à fondre…
C’est encore mieux que les alcools de la classe affaire, non?
Lune de miel en Europe
Autre lieu, autre temps. Je vous emmène maintenant à Saint-Pétersbourg, nous sommes mi-novembre. Après une traversée de l’Europe qui ressemblait un peu à un raid, nous avons repris des forces en visitant à tout va. À cette époque de l’année, le vélo en Russie n’est pas envisageable, alors nous profitons de l’occasion pour réaliser un vieux rêve : rejoindre Pékin par le transsibérien.
Voyager en train en Russie est beaucoup plus simple que ce à quoi nous nous attendions. Pour acheter des billets, des machines en anglais sont à notre disposition. Si vous parlez russe, ça aide à choisir les options (fenêtre, lits superposés, etc…), mais ce n’est franchement pas indispensable. Au grand dam de la famille russe de Claire qui nous gâte depuis 10 jours, nous choisissons la 3ème classe. La première, ce sont des compartiments fermés à deux lits, la deuxième des compartiments fermés à 4 lits (si vos voisins sont difficiles, plusieurs jours enfermés ensemble peuvent sembler longs…). En 3ème classe, il n’y a pas de compartiments fermés, tout le wagon est composé de petits « box » ouverts. Ambiance folklorique assurée, 3ème classe niveau confort mais première classe en ce qui concerne les échanges humains!
Lune de miel dans le Transsibérien
Nous prévoyons de prendre un premier train de Saint-Pétersbourg à Moscou, puis de faire un long trajet de 4 jours sans étape dans le « vrai » transsib’, en nous arrêtant à Irkoutsk. Même si cela nous a empêché de visiter les villes dans lesquelles nous passions (Krasnoiarsk, Novosibirsk, Iekaterinbourg, etc…), nous ne regrettons absolument pas ce choix, car cela nous a permis de nous immerger complètement dans l’ambiance du train, et de vivre à 100% l’expérience.
Nous empaquetons donc Bourriquet et Bourriquette dans des bâches et sacs plastiques, les chargeons sur nos épaules avec tout notre barda de sacoches, et nous traînons péniblement vers notre wagon. La provodnitsa filtre les entrées et malgré notre peur de nous faire refouler à cause de notre chargement nous montons à bord. La provodnitsa est une personne importante avec qui il va falloir être amis. C’est le ou la chef de voiture, qui sera votre source d’information si vous faites une halte. C’est elle qui fermera les toilettes en suivant une logique connue d’elle seule. C’est aussi elle qui vous réveillera la nuit lors des arrêts en gare en allant taper sur les blocs de roues pour faire tomber la glace qui s’y est accumulée, et qui chauffera votre wagon comme une étuve…
Un peu rustique comme nous l’imaginions, nous trouvons de larges espaces au-dessus des bannettes pour stocker les vélos sans qu’ils ne gênent personne. Bon à savoir, à Moscou la consigne marche très bien et est peu chère. Nous y avons laissé nos bourriques pendant 3 jours.
Et puis la véritable aventure commence!
On se croirait dans un roman d’Agatha Christie, où chaque personnage aurait son trait de caractère particulier. Nous sympathisons rapidement avec nos voisins de compartiment. Au deuxième jour nous rejoint un homme à l’air un peu bourru mais qui se révèlera être un excellent compagnon (un vrai Russe, quoi!). Et surtout il a un énorme pistolet à la ceinture! Allons-nous rejouer le Crime et l’Orient-Express? Visiblement nous ne sommes pas les seuls à être interloqués, et nous apprendrons plus tard qu’il s’agit de son arme de service…
Je ne parle pas russe mais heureusement Claire traduit, et la magie du langage des signes opère admirablement. Nous apprenons le durak (un jeu de cartes dont le nom signifie « benêt »…), passons notre temps à manger et faire des aller-retours avec le samovar au bout du wagon, qui nous fournit en eau bouillante pour le thé.
Le rituel dans le train
Le temps disparaît petit à petit. Un petit rituel quotidien s’installe qui rythme la vie à bord. Grasse matinée, toilette, partage de gâteaux en papotant, lecture, jeu de cartes dans les éclats de rire qui se moquent gentiment des deux « durak » de Français un peu fous, rapide visite des alentours lors des arrêts en gare, les babouchkas sont sur le quai et vendent leurs gâteaux et sandwichs… Nous vivons dans un film!
En quelques jours se tissent des liens très forts et c’est avec émotion que Natacha nous quitte à Tioumen, après nous avoir tiré le portrait. D’ailleurs, lorsqu’à notre tour nous descendons à Irkoutsk, qu’elle n’est pas notre surprise de découvrir que Bourriquet et Bourriquette, toujours chaudement empaquetés, nous ont suivis sur le quai, chacun sur l’épaule d’un de nos amis…
Une immersion dans le cœur de la Sibérie et de ses habitants qui nous a émus et bien plus marqués que toutes les premières classes du monde!
Hébergement : hôtel cinq étoile
Et encore, cinq étoiles c’est uniquement quand le ciel est couvert, car bien souvent notre toit c’est le firmament en personne! Nous en profitons au maximum en Espagne. Mois de juillet, il fait beau, chaud, nous en avons terminé avec les rigueurs et les pentes andines. Nous sommes sur le retour et ces quelques kilomètres ibériques ont un goût de vacances. Puis, nous prenons les petites routes depuis Guadalajara, au nord de Madrid, où nous accueillent mes parents, jusqu’au col frontière du Pourtalet. Nous passons notamment par Almazan, Soria, Tudela, le parc naturel Bardenas Reales et la montagne d’Oroel, qui nous occasionnent de belles suées.
Nous dormons à la belle étoile tous les soirs, aucun problème pour trouver un coin de nature bien tranquille. À midi, pour éviter de rouler aux heures les plus chaudes, nous essayons de trouver un coin d’ombre, dégustons fromage et chorizo, puis nous faisons une petite sieste. En contrepartie, nous profitons du soleil qui n’a pas envie de se coucher pour s’arrêter plus tard que d’habitude. Et alors la chambre est toujours avec vue, les voisins jamais bruyants! En plus, le petit-déjeuner est servi dans la chambre sans supplément. Elle est pas belle, la vie!
Comme une continuité de l’Amérique du Sud, la sollicitude des Espagnols est exceptionnelle. Après deux jours sans carte, une libraire nous offre un vieil atlas routier qui fera très bien l’affaire. Le col du Pourtalet est l’occasion d’un dernier coup de pédale difficile, mais les Pyrénées sont tellement belles. Nous franchissons la frontière 10 mois après l’avoir passée dans l’autre sens. Remplis d’émotion, nous nous arrêtons un moment pour repenser à cette année exceptionnelle, puis nous attaquons la descente sur Pau…
Quant au Pérou, l’hébergement est d’une facilité assez exceptionnelle.
Pendant notre mois de séjour là-bas, nous avons fait environ 20 jours de vélo et n’avons dormi qu’une seule fois dehors… Le bon plan a pour nom « hospedaje », que l’on pourrait traduire par « auberge » ou « relais ». Alors que nous sommes entre Huancayo et Ayacucho, nous réalisons vraiment à quel point nous pouvons compter sur ces auberges au confort très variable, même dans le moindre village. Nous empruntons la petite route idyllique traversant Izcuchaca, longeant le Rio Mantaro, que nous surnommons « le fleuve qui monte même en le descendant ».
Notre guide routier Toyota est assez bien fait, mais les choses changent tellement vite que nous avons souvent la bonne surprise de rencontrer de l’asphalte là où nous ne l’attendons pas. Cette route nous fait entrer dans les profondeurs du Pérou. La trame des quelques villages reculés s’effiloche le long de ce fleuve couleur d’or, coincé aux pieds de montagnes altières. La route, elle, essaie de se frayer un passage entre les deux, contrainte de partir à l’assaut de pans de montagnes avant de redescendre vers le fleuve. De bonnes suées pour nous, d’où le nom dont nous affublons le rio. Les quelques kilomètres de piste à la fin de la journée finissent de nous épuiser avant d’arriver à Mayoc, village perdu d’une centaine d’âmes.
L’hébergement
Un carrefour, quelques maisons d’adobe, un âne immobile au milieu et la route poussiéreuse : l’image est digne d’un western! Nous commençons tout juste à nous poser l’épineuse question de l’hébergement lorsque surgit une hospedaje! Comment, ici, dans ce patelin perdu au milieu de nulle part? Nous sommes épatés! Notre palace est fait de quatre murs nus autour d’un lit dont les ressorts ont bien vécu, un toit, un rideau séparant les toilettes et un baquet d’eau froide en guise de douche. Un luxe de simplicité!
Un dernier exemple d’hôtel étoilé en Amérique du Sud.
Ou plutôt devrais-je parler d’hôtel floconné… En provenance de San José de Jachal, nous traversons Callingasta et le parc El Leoncito dans le froid de juin qui s’installe sur la pampa argentine. Sur cette route encore une fois nous avons la bonne surprise de rencontrer beaucoup plus d’asphalte que prévu. Il ne reste que quelques dizaines de kilomètres de ripio sur la dernière section avant Uspallata. Mais quel ripio!
Ça dépasse toutes les tôles ondulées que nous avons rencontrées, et j’ai peur que les porte-bagages rendent l’âme avant l’heure dans cette dernière difficulté. Ouf, tout a bien tenu en retrouvant le goudron. Un nouveau danger fait cependant son apparition : le puma! Au début, nous ne voulons pas trop croire qu’ils s’aventurent proche des routes, mais en ce dernier jour de pampa nous en trouvons un mort dans le bas-côté… Nous tremblons a posteriori en repensant à nos nuits sous la tente…
Logement à Uspallata
À Uspallata, nous craquons pour une cabana, un petit chalet tout confort. Et après tout ce froid, je peux vous assurer qu’il vaut tous les palaces du monde! Nous coucounons pendant 3 jours, histoire de récupérer de la froidure qui nous a bien éprouvés ces derniers temps.
Mais il faut penser à repartir, reprendre la route Mendoza-Los Andes par le Paso Del Cristo Redentor (aussi appelé Los Libertadores). Ce qui veut dire passer une nouvelle fois les Andes. Et même si nous empruntons le col-frontière Chili-Argentine le moins élevé, cela signifie toujours des difficultés, accrues par l’hiver. À cette époque, c’est le dernier col entre les deux pays encore ouvert à la circulation, il peut fermer d’un moment à l’autre à cause de la neige. Mais pour l’instant pas de problème, tout est parfaitement dégagé. Un peu fébriles, nous nous élançons dans le froid, couverts de la tête aux pieds avec ce qu’on a et plus chaud.
Et les difficultés sont largement à la hauteur de nos attentes! Vent de face quasiment tout le long, un pourcentage qui ferait pâlir l’Alpe d’Huez, le froid… bref, en passant au pied de ce roi d’Aconcagua, nous en bavons! À tel point que nous désespérons d’arriver au refuge de Las Cuevas, au niveau du col. Après des heures d’effort à la fois physique et mental pour ne pas craquer (quand je vois que Claire va aussi vite que moi en poussant son vélo, c’est un peu dur pour le moral!), nous y sommes!
Le « Refugio Viento Blanco »
une auberge de montagne, nous accueille dans sa chaleur toute relative. Heureux, nous nous embrassons et passerions presque la soirée à crier victoire! Pas si vite… Au petit-déjeuner, la neige tombe à gros flocons, elle a déjà tout recouvert, et le col est fermé. « Col impraticable, le tunnel-frontière ouvrira demain » nous dit Nestor, le propriétaire de l’auberge.
Nous prenons notre mal en patience, en enfilant tous nos vêtements car la pénurie de bois empêche de chauffer l’auberge… Notre stock de nourriture commence à diminuer également. Le lendemain, grand soleil, les chasse-neiges sont passés, nous chargeons les vélos dans ce décor de Noël, et nous présentons la bouche en cœur au tunnel. Barrières, policiers, interdiction de passer à tout véhicule, ce n’est pas dégagé côté chilien. Une nouvelle tempête de neige arrive dans trois jours, nous commençons à vraiment stresser.
Hotel 3 étoiles
Nous avons un avion à prendre à Santiago pour Madrid, l’avion du retour, il ne s’agirait pas de le rater! Nous retournons à notre hôtel-gruyère 3 étoiles, nous enroulons dans nos sacs de couchage, bougonnons, faisons des plans B… Plus de nourriture, nous achetons un peu de farine à l’auberge pour avoir au moins un bout de pain à manger! Le soir venu, nous n’avons absolument plus rien dans les sacoches. Trois étoiles, tu repasseras!
Et même pour payer en ce troisième jour, nous sommes obligés de racler les fonds de portefeuilles. Quelques pesos argentins, un peu de chilien et un doigt de dollars feront le compte. Deuxième tentative au tunnel, cette fois nous ne sommes plus seuls. Une file de véhicules hétéroclites, motos, voitures, camions, s’étire sur plusieurs kilomètres. Nous avons nos chances… et enfin ça ouvre! Comme le tunnel est interdit aux vélos, une camionnette chilienne nous fait passer de l’autre côté. Nous amorçons la descente dans un état euphorique quasi-second!
J’ai l’impression que « We are the champions » résonne tout autour de moi! Je suis glacé mais je ne le sens pas, et c’est d’émotion que je tremble. Nous sommes sur le point de quitter ces Andes qui nous ont offert un bonheur infini… Nous faisons sensation au poste-frontière, situé côté chilien du tunnel. Lorsque les douaniers nous demandent notre type de véhicule, nous prenons un malin plaisir à rigoler de leurs figures ébahies par notre réponse! Les klaxons encourageants et amicaux nous accompagnent tout au long et la descente, 60km, nous avons réussi! En y repensant, le nom de notre palace à Las Cuevas, « Viento Blanco », aurait dû nous mettre la puce à l’oreille…
Piscine sans chlore incluse.
C’est bien beau tout ça, me direz-vous, mais où est la piscine de la lune de miel idéale?
Facile… Nous sommes en Nouvelle-Zélande, dans le nord de l’île du sud (vous suivez?), à Richmond très exactement. Nous passons la soirée chez Loren et Bryan, nos hôtes de Warmshowers. La grande question du moment, c’est quelle route choisir? Tout a l’air alléchant ici, alors il faut sélectionner le meilleur parcours. Nous avons bien le Pedaller’s Paradise, qui est un assez bon topo-guide pour des cyclos, mais il ne donne pas d’indication sur le niveau d’intérêt des parcours. Bryan et Loren nous conseillent d’aller à Hanmer Springs par la Rainbow Area. « C’est un peu difficile, c’est de la piste, mais ça vaut le coup ». C’est une route construite au départ pour l’entretien de la ligne électrique qui passe au-dessus des montagnes du même nom, et maintenant toute la zone est une sorte de réserve naturelle.
Enthousiasmés par le récit de nos hôtes, nous partons le lendemain dans cette direction. Nous passons par Wakefield, prenons les Eighty-eight Valley, Kerr Hill et Tophouse Roads jusqu’à Saint-Arnaud, pour nous engager en fin de journée sur la fameuse Rainbow Road (attention, elle n’apparaît pas dans GoogleMaps). Nous comptons passer la barrière du parc avant 19h30 (heure de fermeture), puis aller au coin camping 8km plus loin. L’asphalte nous met d’abord en confiance, mais cède rapidement la place au gravier.
Des gués à traverser
une mauvaise chute, l’état de la route et le dénivelé occasionnellement difficile commencent à nous rendre anxieux. Nous arrivons à la barrière pile à l’heure, et la gardienne nous conseille un refuge 1,5km plus loin. On tourne un peu en rond avant de le trouver. Il est à 600-700m de la route, un peu invisible au milieu des champs et des bosquets, accessible par un sentier peu marqué même si un panneau en forme de flèche l’indique vaguement. Nous sommes tout seuls, en profitons pour faire une petite flambée et se requinquer d’un bon risotto aux champignons!
Le lendemain, nous attaquons la véritable montée. C’est du gravier, ça grimpe et nous sommes chargés, mais c’est régulier. Les paysages sont extraordinaires, nous sommes quasiment seuls, et nous profitons du col Island Saddle pour admirer la vue sur les sommets enneigés. Confiants, nous attaquons la descente. Elle se révèle pire que la montée : vent de face, piste en tôle ondulée, nous vibrons de tous nos membres, nos vélos aussi, et nous n’avançons pas. Ce n’est qu’au prix de gros efforts que nous arrivons au camping de Hanmer Springs, bien plus tard que prévu. Nous profitons du service de navette offert par le camping pour passer la soirée à délasser nos muscles bien durs dans la piscine alimentée par l’eau thermale du coin. Alors oui, la piscine est incluse, mais elle se mérite!
Même topo au Pérou…
À Cusco, nous abandonnons l’idée de visiter le Maccu Picchu (hérésie!) et nous optons pour une randonnée autour de l’Ausangate, sur les conseils de Maxime, un Français vivant pour un temps dans l’ancienne capitale inca. Cinquième montagne du Pérou, cet Apu (montagne déifiée en quechua) est parti au sud, dans la cordillère de Vilcanota, chercher de quoi sauver Cusco de la famine (alors que Salkantay partait au nord). C’est un symbole à la fois d’abondance et de rectitude pour les communautés quechua vivant à ses pieds. Nous voilà donc au lever du jour à la gare routière (paradero Livitaca, calle Tomasa, entre l’hôpital et le colliseo cerrado), sacs au dos en mode MUL pour 4 jours. La carte est un simple dessin de Maxime avec des indications un peu vagues. L’office de tourisme peut également en fournir une, mais elle ne vaut guère mieux. Après 160km de routes sinueuses et haut-perchées, le minibus nous dépose à Tinki, départ du trek.
Début de la montée
Dès ce premier jour nous grimpons à plus de 4000 m d’altitude, mais nos organismes sont maintenant acclimatés. La difficulté vient plutôt du fait qu’il n’y ait pas un chemin bien tracé mais des centaines de sillons qui se ressemblent tous. Enfin globalement il faut monter pour contourner ce géant par la droite, l’orientation n’est pas trop difficile. Notre objectif du jour est un groupe d’abris formant des thermes, perdus au milieu de nulle part. Un tuyau déverse l’eau volcanique brûlante dans un bassin rustique, nous bouchons son évacuation avec un mélange de tourbe, d’herbe et de bouse de lamas. Pas de régulation de température ici, nous sommes en contact direct avec le centre de la Terre! Nous passons un bon moment à nous délasser, tout nus car tout seuls, avant de nous sécher rapidement et de trouver un bivouac.
Les deux jours suivants passent comme dans un rêve. Nous tournons autour de ce mastodonte aux allures de crème glacée à la vanille, traversons lacs, cascades, grimpons sur les 5300 m de « la montagne rouge ». Quasiment seuls dans cette nature à l’état sauvage, parfois accompagnés au loin de quelques vigognes, nous nous émerveillons à chaque pas. L’après-midi du 3ème jour, nous cherchons notre chemin. « Tu verras, il y a 3 sommets alignés, tu peux pas les louper, tu passes à gauche ». Super Maxime, des groupes de 3 sommets alignés, j’en vois des dizaines! Après quelques efforts inutiles, nous parvenons à retrouver notre chemin (une large vallée assez évidente, en fin de compte…), et nous réfugions sous la tente en vitesse pour nous abriter de la bourrasque de neige qui surgit brusquement.
La suite pour rentrer à Cusco
Dernier jour, nous redescendons à notre point de départ, sans manquer les seconds thermes du parcours! Cette fois il y a du monde, nous gardons les sous-vêtements. De l’eau toujours brûlante, un bassin toujours aussi rustique, nous nous délassons sans vergogne de ces 4 jours de trek. Et oui, là encore la piscine s’est faite mériter! Au village c’est dimanche, jour de marché, ambiance multicolore, parfumée, gouailleuse, un joyeux bordel! Nous trouvons une place dans un mini-bus qui rentre à Cusco, serrés comme des sardines mais avec des images plein les yeux…
Devenir des habitués de la restauration gastronomique.
Car évidemment, en bons Français, les repas prennent une part très importante dans notre quotidien. Deux manières de découvrir la culture culinaire des pays que nous traversons : soit en cuisinant nous-mêmes avec ce que nous trouvons, soit en profitant des petits resto locaux.
Gastronomie en Europe
En Europe, nous ne sommes pas trop dépaysés, et nous cuisinons des aliments habituels. Le réchaud à essence fait bon ménage avec la popote! Nos rencontres sont l’occasion de découvertes pour nos papilles. Comme ce couple d’agriculteurs hongrois chez qui nous plantons la tente et qui, le soir venu, nous invite à partager schnaps et fromages maison, en discutant en Allemand (le schnaps aidant).
Se restaurer en Pologne
Ou alors en Pologne, au nord de Cracovie, dans le petit village d’Osini. Difficile de trouver une bonne âme chez qui planter la tente, mais quand nous demandons à Irena, c’est hors de question de dormir dehors! La voilà qui embarque toutes nos affaires à l’intérieur, et en moins de temps qu’il ne nous en faut pour le réaliser, nous sommes attablés avec toute la famille. Un tourbillon de russe, d’anglais, de GoogleTranslate et de ces formidables outils dont la nature a pourvu les extrémités de nos bras (des mains, oui…) nous embarque dans une soirée merveilleuse dont nous garderons un souvenir ému! Le lendemain, nous savourons un zurek au petit-déjeuner, une soupe à l’œuf et la saucisse, bien énergisante pour la journée à venir!
À Saint-Pétersbourg …
nous engloutissons des pirojkis, sortes de beignets briochés et fourrés au chou ou à n’importe quoi d’autre! Délicieux, de quoi reconstituer nos réserves lipidiques… Omouls séchés à Listvyanka près du lac Baikal, miel et pollen en Lettonie, noodles en Mongolie, beaucoup de « Pollo a la brasa » et empanadas en Amérique du Sud, sans oublier les salchipaperia : assiettes de frites garnies de rondelles de saucisses, une véritable spécialité! Et en dessert, dulce de leche! Nous faisons une orgie de fruits et légumes frais en Asie : mangues, papayes, bananes, mango cut, et une ribambelle d’autres complètement inconnus.
Un fruit sud-américain qu’il faut absolument tester car il s’exporte très peu du fait de la difficulté à le conserver longtemps : le chirrimoya. De loin ça ressemble à un artichaut, de près les reliefs qui figuraient des feuilles sont en fait une sorte d’écaille. En le coupant au milieu comme un pamplemousse, il révèle une chair blanche onctueuse et nourrissante qui fait penser à un yaourt à la banane! C’est un délice…
Le must au vietnam
Mais la meilleure cuisine que nous ayons goûtée vient du Vietnam. Nous arrivons à Sapa au nord, et renouons avec du vrai café (goût chocolat, façon vietnamienne!) et des baguettes. Après la Chine, c’est un signe! Et puis nous découvrons les petites sucreries faites à partir de pâte de riz (banh- veut dire gâteau, ou en tout cas désigne quelque chose d’approchant). Chaque gargote a son plat particulier, sa recette familiale qui se transmet de génération en génération. Les soupes (pho) sont particulièrement excellentes.
Les Vietnamiens cuisinent leurs produits avec un raffinement extrême : wonton, cao lau, nems, galettes de riz, poisson, white rose, gâteaux de riz enrobés dans des feuilles de bananier, salades de fruits… La liste pourrait s’étendre sur des pages, et chacun de ces plats se décline à l’infini en fonction des assaisonnements, des herbes, de la citronnelle, du gingembre et des mille autres saveurs locales. Nous avons envie de tout tester, à tel point que nous nous offrons le luxe d’un cours de cuisine à Hoi An.
Le long de la route, nous nous régalons de « bouz » : c’est le nom mongol pour des beignets fourrés et cuits à la vapeur, mais on les retrouve dans toute l’Asie. Nous mangeons absolument tout, sans faire attention aux recommandations sanitaires. Ce manque de prudence me vaudra des maux de ventre terribles pendant le réveillon du jour de l’an, en plein milieu de la baie d’Halong…
Délice de Nouvelles-Zélande
En Nouvelle-Zélande, nous faisons l’acquisition d’une poêle qui change notre quotidien : nous pouvons faire frire des choses! Enfin, comment ne pas mentionner Cafayate et ses vins merveilleux. Le Cabernet Sauvignon est le meilleur que nous ayons goûté, le Torrontes et le Malbec, typiques de la région, sont excellents également, et nous transportons plusieurs bouteilles dans nos sacoches!
Un an de gastronomie laisse des marques, alors notre cuisine s’est dorénavant enrichie de facettes exotiques!
L’aventure quotidienne.
Bien sûr dans toute lune de miel il doit y avoir une part d’aventure. De ce côté-là, nous n’avons pas eu à nous plaindre.
Commençons par le traditionnel safari!
Nous venons de passer la frontière vietnamo-cambodgienne à Le Thann. Très simple, aucun bakchich, juste 20$ comme prévu et indiqué sur les panneaux, et en 10mn nous recevons notre visa. Peu de touristes passent par là, encore moins des cyclos, alors notre situation facilite grandement les choses. Après un après-midi de pédalage sur des routes impeccables à la découverte de ce nouveau pays, sous une température de 45°C très supportable grâce à la sécheresse de l’air, nous nous arrêtons pour camper dans une plantation. Aucun problème pour trouver des coins de bivouac les gens ne sont pas trop curieux ni intrusifs, à la différence de leurs voisins vietnamiens. Nous atteignons Ban-Lung le lendemain, trouvons une carte du pays, et devons faire face à un dilemme pour rejoindre Phnom Penh.
Allons-nous emprunter l’asphalte plat et urbanisé des bords du Mékong, ou plutôt prendre la tangente et passer par cette piste à travers la brousse jusqu’à Sen Monorom?
Nous hésitons longuement, et notre goût de l’aventure l’emporte. Nous chargeons 20L d’eau sur Bourriquet et Bourriquette, de quoi tenir 24h en autonomie, et examinons notre carte. Visiblement imprimée d’Internet, c’est la moins imprécise que nous ayons trouvée! Il y a environ 100 km à faire entre Lumphat et Kaoh Neakh, les villages les plus éloignés. Nous déjeunons donc à Lumphat puis trouvons un bac (fait de 2 pirogues assemblées bizarrement avec des planches… mais qui a l’air de résister au poids d’une voiture) pour traverser le dernier cours d’eau… et nous voilà seuls sur la piste!
C’est très plat
mais nos vélos chargés comme jamais s’enfoncent dans le sable qui recouvre tout. Nous essayons d’optimiser les trajectoires pour trouver une parcelle de revêtement sur laquelle nos fameux pneus Schwalbe accrocheraient, en vain, nous descendons de vélo très souvent et nous épuisons rapidement. À la fatigue physique s’ajoute une bonne dose de tension nerveuse : alors que notre carte n’indique qu’une seule piste, nous en croisons des centaines qui partent dans tous les sens! Impossible de s’orienter dans cette inextricable toile de sable!
Heureusement il y a un minimum de passage, et nous croisons quelques motos ou camions. Peut-être des contrebandiers de bois, comme il y en a un peu dans la zone frontalière avec le Vietnam, nous ne le saurons jamais. En tout cas, cela nous permet de nous assurer de temps à autres que nous sommes sur le bon chemin. Après une demi-douzaine d’heures de véritable raid, nous plantons la tente. Des flammes couvent tout autour de nous, vraisemblablement des feux allumés dans le but de nettoyer la forêt mais désormais complètement hors de contrôle…
Dormir au milieu des cendres
Nous choisissons donc un endroit où ne restent que des cendres, du bon côté du vent, juste au cas où! Cette soirée perdus dans la brousse au milieu de ces brasiers luisant au loin tout autour de nous a quelque chose de fantasmagorique!
Nous repartons le lendemain, je râle de plus belle en poussant mon vélo de 60kg, passant occasionnellement mes nerfs d’un bon coup de pied sur le cadre, pauvre Bourriquet! De plus en plus tendus, nous essayons de déceler le moindre indice qui nous confirmerait que nous serions sur le bon chemin, que Kaoh Neakh approche. Alors que nos réserves d’eau atteignent un niveau critique, nous apercevons les premières bicoques. Quel soulagement!
Nous dévalisons la glacière de la minuscule boutique et refaisons quelques réserves d’eau, mais le rationnement reste de rigueur pour les derniers kilomètres de brousse tout aussi difficiles que les précédents.
Enfin Kaoh Neakh fait son apparition!
Nous nous relaxons pour de bon et nous engageons sur la route de latérite, direction Sen Monorom. Cette fois-ci nous pouvons rouler à un rythme décent, mais des sections en travaux, ressemblant à des champs de cailloux, nous ralentissent bien. Il nous faudra encore une journée pour faire les 60km qui nous séparent de l’asphalte.
Dernier plein d’eau, en temps normal, sous la chaleur cambodgienne, nous consommons quotidiennement 12 à 14L, à 2, en comptant l’eau de cuisine. Pour cette traversée nous sommes montés à 20L, et c’était limite… Je demande un ananas sur un stand, la vendeuse me le découpe et me l’offre. En nous prenant en photo au soir de ce 3ème jour à dominante piste, nous comprenons pourquoi : nous sommes recouverts de terre rouge, les traits tirés, bien maigres, et nous avons l’air de clochards! Bourriquet et Bourriquette n’en mènent pas large non plus… Mais nous avons aussi dans les yeux cette petite étincelle que seule l’aventure un peu folle peut faire briller!
3 mois en Amérique du Sud
Une grande partie de ce Road-Book relate nos aventures en Amérique du Sud, alors que nous n’y avons passé que 3 mois de notre année sabbatique. Les deux anecdotes suivantes s’y déroulent également. Vous l’aurez compris, c’est très révélateur des sentiments que nous éprouvons envers ce continent : nous l’adorons! Tout semble positif ici : les décors, magnifiques, les gens attentionnés, généreux, souriants, avec juste la bonne dose d’insouciance, sans oublier les fromages, vins, empanadas et glaces de Grido!
Tout est facile en Amérique du Sud, alors à La Paz nous décidons de tenter l’ascension du Huayna Potosi, 6080m. C’est de l’alpinisme, nous passons par une agence pour louer les services d’un guide. Comment choisir parmi les dizaines qui s’offrent à vous? Peu importe, en fait, elles sont assez équivalentes. Soyez juste sûrs de la formation des guides, qu’elle soit réalisée par des professionnels (le plus souvent des Français, Suisses ou Espagnols).
Formule tout compris
Tout est compris dans notre formule à 80€/personne : transport, nuit en refuge, repas, guide, équipement complet (il est presque possible de venir en caleçon et de se faire habiller de la tête aux pieds!). Nous partons donc vers 11h en voiture sur des pistes défoncées, nous arrêtons pour prendre la photo du sommet de loin (en décidant qu’on ne la diffusera que si nous arrivons en haut!), et atteignons le départ. Nous chargeons tout sur notre dos (oubliez la MUL…) et commençons à grimper jusqu’au refuge. Bien acclimatés à l’altitude, nous avalons le dénivelé sans problème. Au refuge, nous retrouvons une dizaine de cordées, quasiment toutes françaises! Nous passons la soirée dans une ambiance colonie de vacances, et lorsque vient l’heure d’aller se coucher, nous sommes excités comme des enfants!
Ça ou l’altitude, peut-être les deux, m’empêchent de dormir, et je me réveille à 1h du matin pas très frais, avec une petite migraine. Comme nous avons bien grimpé hier, nous sommes les derniers à partir. J’adore l’alpinisme, cette ambiance un peu fébrile dans le brouhaha feutré du refuge, puis le crissement des crampons dans la neige dure, le rythme répétitif du piolet, la sensation des muscles qui travaillent tous ensemble… Nous montons vraiment bien dans la nuit, dépassons quelques cordées, puis faisons des pauses tous ensemble.
Les guides locaux sont très sympas, et toujours cette ambiance colo!
L’arête finale est un peu plus technique, très à-pic et étroite. L’euphorie d’arriver au sommet (plus de 6000m d’altitude quand même! Une première pour nous deux) a chassé mon mal de tête. Une dernière longueur et nous y voilà! Assis au sommet, nous contemplons les lumières de La Paz au loin, le paysage autour et en-dessous de nous qui brille dans le soleil levant.
Nous redescendons avec la même étincelle dans les yeux que celle que nous avions au Cambodge, celle qui veut dire que nous avons réussi notre défi, notre aventure à notre mesure!
Restons en Bolivie pour le moment, mais accélérons le temps et descendons un peu plus au sud. En empruntant la route de La Paz à Oruro, des travaux d’élargissement de la chaussée pour en faire une double-voie sont en cours. Comme la nouvelle route n’est pas encore ouverte à la circulation, nous profitons d’un revêtement tout neuf juste pour nous, ce qui nous évite les mini-bus fous, à peu près les pires que nous ayons côtoyés!
L’altiplano mérite bien son nom : 3500m d’altitude, la pampa à perte de vue!
Nous dormons une dernière nuit à Challapata et bénéficions même le lendemain d’un supplément d’asphalte jusqu’à Quicallas. Chose étrange, la route en direction d’Uyuni est une piste qui semble être en bien pire condition que celle qui mène au salar, même si nous subissons notre comptant de tronçons défoncés!
Après une nuit dans la nature, nous apercevons Salinas Grande, au pied du volcan Tunupa. C’est notre dernier point de ravitaillement avant de nous engager sur le salar. Pour atteindre ce géant blanc, nous quittons la piste pour couper par les abords du désert, plus durs et roulants. Nous avons une bonne carte, achetée à La Paz, et il y a quelques points de repères pour s’orienter. D’abord cet énorme volcan, autour duquel nous tournons, en roulant parfois sur ce mélange de sable et de sel, pas encore vraiment le salar, parfois sur le « continent » (plus difficile car les pistes sont en sable mou).
À force de tourner autour, nous nous retrouvons pour de bon sur cette texture de neige solide. Le soir arrive, nous camperons dans le sel! Impossible de planter les sardines, nous tendons la tente comme nous pouvons et nous mettons vite à l’abri. Car dès la nuit tombée, même s’il fait chaud en journée, le froid arrive au grand galop sur ce miroir qui n’absorbe aucun infrarouge.
Petite île au milieu du salar
Le lendemain, nous cherchons notre deuxième point de repère : l’Isla Incahuasi, une petite île au milieu du salar, presque invisible dans le « fond de côte » de la rive opposée. Marins de métier, nous nous amusons de cette navigation sur un océan peu ordinaire. D’abord prendre l’alignement du volcan et de l’île sur la carte, tourner vers l’ouest jusqu’à croiser l’azimut du volcan, et enfin mettre le cap sur la direction théorique de l’île. Ça marche plutôt bien, des traces de véhicules et des 4×4 au loin nous aidant un peu à prendre la bonne direction.
Nous prenons du bon temps, passons une journée dans ce décor complètement fou, jouant avec l’absence de perspectives pour prendre des photos loufoques! C’est magique… Encore un souvenir pour la vie! Pour la sortie, nous visons un peu à l’est du continent, sur les conseils de cyclos rencontrés quelques jours auparavant. Ils nous avaient dit que par la voie directe, très humide, la progression était éprouvante. Au bout d’un moment, nous croisons une piste qui semble praticable pour rejoindre la côte, comme une digue au-dessus d’une mélasse d’eau et de sel fondu. Bien nous en a pris de suivre ce bon conseil! Nous passons une partie de la soirée à dessaler Bourriquet et Bourriquette pour limiter la corrosion.
Les jours suivants sont terribles.
Nous évoluons dans le Lipez, les pistes sont un mélange de sable, de sel et de boue, le tout en forme de tôle ondulée. Bourriquet a la chaîne distendue, et quand les volcans alentours revêtent leur manteaux de neige, nous abandonnons l’idée de traverser ce désert. Nous rejoignons le Chili tels 2 somnambules miraculés, en suivant une ligne électrique dans une piste de boue caillouteuse atroce. Nous sommes fin mai et il fait déjà très froid, nous vivons un véritable raid. Tous les soirs, nous plantons la tente à toute vitesse, y balançons tout ce qui pourrait nous servir, y compris le réchaud, et nous glissons dans les sacs de couchage pour récupérer un peu de chaleur.
La tente est très petite, ce qui permet de « chauffer » l’atmosphère rapidement. Le réchaud au gaz est LA bonne solution, car du fait de la flamme très localisée, nous pouvons cuisiner à l’intérieur. Je dois quand même garder la cartouche dans le sac de couchage pendant la nuit pour qu’elle ait la force de donner un peu au petit-déjeuner… Ce rythme dure encore 2 jours puis nous redescendons vers Calama et la chaleur nous rattrape. Une dernière journée de 140 km sous un soleil de plomb, et nous voilà à San Pedro de Atacama. C’est le spot touristique par excellence, avec plein d’activités fun à faire. Mais nous avons eu notre dose d’aventure, nous passons nos journées à lire, dormir et manger!
Cinq jours de désacclimatation à 2500m plus tard
nous remettons le couvert pour une nouvelle traversée des Andes par le Paso Jama. Nous réalisons alors notre plus petite distance de tout le voyage : 45km, 1800m de dénivelé. Epuisés par le froid, l’altitude et le dénivelé, nous campons quasiment au col. Même topo que dans le Lipez pour se réfugier sous la tente le plus vite possible. Depuis notre bivouac nous apercevons la route d’où nous serions venus si nous avions traversé le Lipez. 1m de neige, bien entendu non dégagée, impraticable, nous n’avons aucun regret.
Le lendemain, nous profitons du vent dans le dos pour littéralement décoller! Sauf sur ces 8km terribles où la route vire face au vent. Eole nous déséquilibre naturellement, alors quand je sens qu’en plus un camion est sur le point d’y ajouter son aspiration, je mets carrément pied à terre. Heureusement ça ne dure pas, et nous avons une pensée pour ces cyclos en Néoprène croisés dans l’autre sens.
Nous franchissons la frontière argentine et nous apprêtons enfin à redescendre vers des altitudes et des températures plus clémentes, profiter du farniente argentin et délaisser enfin pour quelques temps nos aventures mouvementées! Pourquoi faisons-nous tout ça? Question difficile, il y a sans doute une part de masochisme, mais le plaisir que nous y prenons est peut-être une justification en soi… Et les photos ne sont-elles pas aussi une bonne réponse?
Conclusion notre Lune de miel autour du monde en vélo
J’espère vous avoir convaincu que la meilleure des lunes de miel est le voyage que vous inventerez! Pour nous le cyclotourisme s’est imposé comme une évidence, car nous apprécions le merveilleux compromis que la vitesse de ce type de moyen de transport nous apporte : assez lent pour s’imprégner des lieux, profiter de l’environnement, assez rapide pour voir les choses que nous voulons.
Les routes que nous avons empruntées nous ont de temps en temps bien faits souffrir, nous avons parfois trouvé nos limites d’ouverture d’esprit à certaines cultures que nous n’avons pas comprises, mais chaque jour a été l’occasion d’un émerveillement!
Ce récit de voyage est un peu hétéroclite, il vous donne les informations marquantes de notre voyage, celles qui nous ont été utiles. J’espère que nos expériences pourront vous servir à planifier un voyage si vous envisagez quelques étapes similaires.
Le matériel utilisé durant notre Lune de miel autour du monde en vélo
Catégorie | Modèle | Marque | Pourquoi ce modèle au départ? | A-t-il répondu à mes attentes ? | Si c’était à refaire ? |
Les vélos et leur matériel | |||||
Cadre | Bad Boy | Cannondale | Nous voulions une base VTT pour aller sur des pistes au revêtement difficile.26″ était une priorité pour son caractère standard.Modèle conseillé par notre vélociste | Passe partout, aucun rayon cassé en 20000km sur des pistes défoncées…En discutant sur la route, le 26″ est véritablement une nécessité. Les autres tailles ne se trouvent pas partout. | Exactement le même, excepté la fourche avant pour laquelle il manque un trou fileté pour le porte-bagage |
Guidon | Papillon | BBB | Ergonomie, souhait de changement de position des mains régulièrement. | Aucun fourmillement dans les mains, très bonne maniabilité | Même choix |
Selle | Sonoma | Specialized | Nous voulions du confort pour pouvoir rester 12h/jour sur une selle. | Conseillées par notre vélociste, presque sur-mesure, ces selles étaient un miracle! | Même choix |
Groupe de transmission | Alivio | Shimano | Souhait d’avoir un peu plus de robustesse que le modèle de série, sans avoir besoin de grande précision. | Facilement réglable, assez robuste, il a tout de même fallu changer les galets de dérailleur au milieu du périple. | Bon compromis robustesse/ prix, nous ne regrettons pas ce choix. Attention à emporter des galets de rechange. |
Porte-bagage AV | Lowrider | XLC | Nécessité d’avoir un PB sans vis dans la fourche. Celui-ci est en serrage sur la fourche avec des pattes fixées aux V-brakes. | Les pattes attachées aux V-brakes ont cassé plusieurs fois, les tiges en alu aussi. Ils ont rempli leur fonction sur le fil, ni plus ni moins.Il faut dire qu’ils supportaient beaucoup de poids dans des conditions vibratoires intenses… | Ils auraient pu casser plus tôt, nous avons eu de la chance. Il serait préférable d’avoir un porte-bagage vissé à la fourche pour s’affranchir des faiblesses dues aux vibrations |
Porte-bagage AR | Rider | Zéfal | Alu plutôt qu’acier car aucune casse durant nos précédents voyages. Pouvant supporter jusqu’à 30kg. | Quelques tiges cassées sur la fin, facilement réparables avec des serflex, mais avec un poids constamment aux limites des spécifications c’est un assez bon résultat. | Même choix, la solidité de l’alu nous a suffit, pas besoin d’acier (plus cher et plus lourd). |
Pneus | Marathon Dureme | Schwalbe | Souhait d’avoir un pneu robuste et polyvalent route (assez lisse pour ne pas rester collé au goudron) / chemin (un peu cranté pour accrocher) | Conseillé par d’autres cyclos qui avait réalisé un tour de l’Amérique du Sud, ça a été une révélation! Hyper solides, roulants mais accrochant, larges donc étalant le poids sur une grande surface, ça a été LE bon choix. | Même choix, ou profil équivalent chez Schwalbe. |
Freins | V-brake | Treko | Souci de standard disponible partout et de simplicité | Il a fallu changer quelques patins, on s’y attendait, mais ils ont rempli leur fonction | Même choix, la simplicité et le basique restant une priorité. |
Béquilles | / | / | Pas de béquille au départ, mais vite nécessaire. Système monté sur fourche arrière. | Celle sur le vélo le plus chargé a cassé plusieurs fois, il a fini sans rien. Sur l’autre elle s’est détériorée mais a tenu bon. | Il faudrait trouver un système assez robuste pour tenir un grand poids (béquille centrale?) |
Rétroviseurs | A patte courte | Busch&Müller | Souci de sécurité, patte courte pour diminuer l’impact des vibrations sur le mouvement du miroir. | Un bon produit à la fois sécurisant et permettant de voir où est l’autre. | Même choix, la patte courte stabilise bien le miroir. |
Sacoches de guidon | AquaBox | Vaude | Souci d’étanchéité et de robustesse. | Boutons pression cassés au bout d’un mois, perte d’étanchéité : c’est un échec. | Ne pas acheter Vaude : prix 4 étoiles pour une qualité bas de gamme. |
Sacoches AV Francis | FrontRoller Classic | Ortlieb | Etanchéité/ Robustesse | Facile à monter sur les porte-bagages, très étanches et robustes | A recommander, de très bonnes sacoches, une boutique à Bangkok m’a même donné des adaptateurs pour le diamètre des tubes de mon PB alors que je les avais perdus. |
Sacoches AR Francis | AquaPro Back | Vaude | Etanchéité, robustesse, volume | Le système de fixation au PB est intelligent en théorie, mais en pratique une rigole en plastique se fend sans qu’elle soit réparable, rendant les crochets de fixation inutilisables (obligé d’utiliser des tendeurs, ça ne fait pas riche…). Le hardback a cassé à la première utilisation, le clips de fermeture du rabat quelques temps après. | Ne pas acheter Vaude : prix 4 étoiles pour une qualité bas de gamme. Préférer Ortlieb pour le même prix. Malheureusement Vaude opte pour la technicité au détriment de la solidité. SàV inexistant lorsque je leur ai exposé tous les problèmes… |
Sacoches AV/AR Claire | Lowrider/ Globetrotter | XLC | Etanchéité, robustesse, volume, prix | Moins chères que les autres marques, aux systèmes basiques (donc bons dans le cadre d’un voyage éprouvant), elles sont tout aussi étanches et plus robustes que les Vaude. Un peu moins pratiques à utiliser (système de fermeture). | Très bon choix, à recommander. |
Le matériel de bivouac | |||||
Tente | UltraLight2 | McKinley | Notre tente depuis toujours | De type tunnel très basse (90cm au plus haut), ça a été un avantage dans le froid : elle chauffe vite.Les fermetures éclair se sont grippées, mais après 10 ans d’utilisation c’est pas mal!Nous avons cassé un arceau par une mauvaise manipulation, mais le tube en alu pour rigidifier a fait son office. | Nous réparerons les fermetures (juste les chariots à changer chez une couturière), changerons l’arceau (McKinley m’en a déjà renvoyé un gratuitement, hors garantie), et ça repartira pour 10 ans! |
Sacs de couchage | Forclaz 0 et S5 Ultralight | Quechua | Nos sacs depuis toujours, on les pensait assez chauds.Nous avons rajouté des sacs de soie. | Juste chauds comme il faut, pas trop lourds (1kg l’un, 1.5kg l’autre), ils ont fait ce qu’il faut. Jumelables (appréciable quand il fait froid).Les sacs de soie sont judicieux : pas besoin de laver les duvets, une couche en plus. | Il existe maintenant du matériel récent léger et chaud. Nous réutiliserons les nôtres, mais une étude plus poussées des températures traversées nous amènera peut-être à les changer.Les sacs de soie sont devenus un must. |
Matelas | Rest | Camp | Compromis confort/poids, mousse autogonflante. | Confortables, ils ont crevé par endroits (micro-trous), mais grâce à la mousse ils isolaient quand même du sol et fournissaient une couche confort. | A réparer, mais un bon matériel, peu cher. |
Réchaud | Omnifuel | Primus | Autonomie grâce à l’essence, rapidité de chauffage, puissance. | Très robuste, nous l’avons fait marcher à l’essence pendant environ 6 mois. Il s’est alors encrassé et nous n’arrivions plus à le faire fonctionner.En panique, sur les conseils du SAV néozélandais, nous nous sommes rabattus sur le gaz. Miracle! Nous avons utilisé uniquement du gaz après ça. Le gaz nettoie en plus les tuyaux.Au retour en France, je l’ai envoyé en révision et il marche comme au premier jour. | Pas besoin d’utiliser d’essence en voyage à vélo : contrairement à la rumeur, il existe du gaz dans toutes les grosses villes, ou de l’essence blanche, et on ne reste jamais à plus de 3 semaines d’une telle ville (temps pour utiliser 2 cartouches de 500g). Non encrassants, ces produits sont bien meilleurs. Mais ce modèle de réchaud reste notre choix avec ce type de carburants. |
Sac à dos | Peuterey 40 | Millet | Notre sac à dos de toujours, 45L, pour la rando. | Utilisé uniquement pour la rando, il est adapté à ma physionomie, est léger, solide, étanche… | Même choix, je n’ai pas encore trouvé mieux, même dans les modèles récents. |
Sandales | Commuter | Keen | Combiner en une chaussure 2 des activités suivantes : rando, vélo, repos. | Plutôt que combiner les 2 premières (je n’étais pas conquis par le rendu des chaussures de marche avec cales existant sur le marché), j’ai combiné les 2 dernières.Résultat exceptionnel, ces sandales tiennent bien le pied mais sont aérées, les cales SPD sont efficaces. | Exactement le même choix. Ce sont les seules sandales à cales SPD qui tiennent assez le pied pour rendre les pédales automatiques efficaces. |
Et le reste… | |||||
Appareils photos | Cybershot | Sony | Autonomie en énergie, qualité de photo : un bridge et un compact. | Le même type de batterie pour les 2 appareils, le même type de carte mémoire, ils ont bien rempli leurs fonction. Le bridge est un peu lourd mais fait de bonnes photos. | Il doit exister aujourd’hui des produits de bien meilleure qualité, mais je ne suis pas sûr de leurs capacité d’autonomie… A voir. |
Caméra | Drift HD | Drift | Le hasard entre la GoPro et elle, avec un penchant pour les systèmes de fixation sur le guidon de la Drift, sa lentille tournante permettant d’ajuster l’horizon. | Autonomie vraiment faible, mais c’était ce qu’il y avait de mieux à l’époque.Qualité excellente, mais bon à savoir, la lentille peut translater sur une vis à l’intérieur, et fausser la focale, d’où un flou. Il suffit de la revisser à la bonne position. | Peut-être voir ce qui se fait maintenant (surtout concernant l’autonomie), mais les pattes de fixation sur le guidon ou ailleurs sont indéniablement un + par rapport à la GoPro. La lentille tournante aussi. |
Informatique | iPad | Apple | Pouvoir planifier, réserver des guesthouses, envoyer des mails, tenir le blog, faire du skype,… Génération internet oblige! Avec une bonne autonomie! Protégé par une housse en néoprène assez étanche et des coques plastique. | Au début on pensait que ça serait un gadget, mais c’est en fait un choix qu’on ne peut pas regretter. L’autonomie exceptionnelle de l’iPad (20h en utilisation normale) n’a pas d’équivalent, paramètre fondamental.Capacités proches de celles d’un ordinateur.Nous avons eu la bonne surprise de voir qu’il était très robuste.Il a rempli toutes les fonctions que nous lui demandions, a été d’une grande aide pour s’affranchir des cybercafés. | Le seul hic des produits Apple, c’est qu’ils verrouillent tout. Cela ne nous a pas gêné pendant le voyage, et nous repartirions avec le même. |
Energie électrique | Dymotec S6 + e-Werk | Busch&Müller | Autonomie même en plein désert, plus léger et plus universel qu’un panneau solaire (pas besoin de soleil). Très attrayant, le principe du couplage de la dynamo avec le redresseur de tension puis le branchement des appareils via un standard USB semble parfait. | Malheureusement en pratique il faut fixer la dynamo parfaitement pour qu’elle fournisse un courant assez stable à l’e-Werk.Avec nos cadres, c’était impossible.En outre, nous avions assez d’autonomie sur nos appareils pour ne recharger que tous les 10 jours sur une prise, à l’occasion d’un camping ou d’un passage dans une station-essence | La dynamo et l’e-Werk sont déjà revendus… |
Chargeur USB + adaptateur secteur universel + câbles USB | Divers | Standard USB pour branchement simple à l’e-Werk (délivrant du 5V), ou standard universel pour un ordinateur partout dans le monde. | Suite à l’échec ci-dessus, nous avons opté pour un chargeur avec prise USB associé à un adaptateur universel à un bout et un câble USB vers l’appareil à charger à l’autre bout.Plus léger que la solution précédente, ça a été parfait. | Nous reprendrions le même système. |