Jérôme POUILLOUX nous partage son expérience de sa sortie escalade au Beaufortain.
Informations pour préparer un séjour escalade au Beaufortain
- Date
entre le 29 juillet 2013 et le 5 aout 2013
- Lieu
France – Rhone Alpes – Savoie – Aime 73210
- Participants au Trip escalade au Beaufortain
Minus : grimpeuse de l’extrême, sauveuse des être vivants de ce monde
Chouchou : pratique toutes les formes d’escalades du bloc à l’alpinisme depuis presque 15ans, avec une préférence pour la haute montagne ou le terrain d’aventure. Les Ecrins sont un très beau massif à parcourir.
Où dormir dans le Beaufortain:
- on a dormi en bivouac, afin de pouvoir se positionner au mieux pour les marches d’approche.
- Il y a quelques refuges tout le long du parcours :
- Le gite pollen à granier pour le 1er jour
- Refuge de presset pour le début traversée
- Refuge Pierra Menta de la balme selon l’ordre dans lequel on effectue les voies d’escalade au beaufortain
- Auberge refuge de la nova pour aller à Séloge (cb non acceptée) ou
- Camping aux chapieux pou la fin de la traversée
Où se restaurer/où se réapprovisionner:
à Aime (tous commerces)
aux chapieux : épicerie
fromagerie à la Ville des glaciers (à ne pas manquer)
- Office du tourisme
- Caractéristiques du massif du Beaufortain
La traversée est à effectuer de préférence entre les mois de juin à septembre. Cet massif (malgré toute la quantité de neige tombée l’hiver précédent!) se pratique bien avec une paire de chaussures de randonnée légères.
Toutes les voies que nous avons parcourues sont globalement en bon calcaire, avec toutefois quelques unes comportant des passages de rocher plus « interactif »(comprendre rocher péteux) mais rien de bien méchant.
L’escalade au beaufortain est plus technique que physique.
En ayant un peu de marge dans le 6a, il y a beaucoup de jolies voies à parcourir (de quoi faire 2 ou 3 variantes de cette traversée), le tout sans avoir besoin de matériel de terrain d’aventure, mais il faut réellement grimper entre les points (quelques voies un peu plus engagées, voir exposé toutes les voies de la grande falaise de Séloge).
Les voies d’escalade au beaufortain sont dans l’ensemble relativement courtes (6 longueurs) avec une descente en rappel par la ligne de montée ce qui permet de s’échapper assez facilement au besoin. (sauf pour l’aiguille de la Nova qui est une course d ‘ampleur).
Le Mont Blanc, la Pierra Menta ainsi que sur le panorama sur le parc National de la Vanoise sont omniprésents tout au long du périple. Les courageux pourront se baigner dans quelques lacs.
On a croisé beaucoup de randonneurs mais les voies d’escalade au beaufortain ne sont pas sur fréquentées, hormis pour la Pierra Menta.
Les approches sont courtes surtout si on adopte une bonne stratégie de bivouac, par contre le terrain d’approche est du terrain de montagne technique (pierriers assez raide avec la présence de neige possible en début de saison) pour la plupart des voies.
Cette traversée peut tout à fait se faire uniquement en refuge, mais les approches deviendront un peu plus longues
- Quoi d’autre dans les environs
- Parc National de la Vanoise…
- Ski de randonnée la grande casse en Vanoise
- Bibliographie
Le Topo de la Vanoise : Tarentaise – Beaufortain de Philippe Deslandes et James Merel
- Lien Internet
liste des voies de la région (n’en ayant fait qu’une petite partie) : Camp To Camp
- Programme en détail de notre séjour rando et escalade au Beaufortain
Date | Jour | Type | Description |
27/08/13 | 1 | randonnée | Aime- lac de la Portette |
28/07/13 | 2 | escalade | Crête de la grande Pareï : Sonnatine et C’est pas le pérou |
29/07/13 | 3 | randonnée | jour de pluie… |
29/07/13 | 4 | escalade | Crête de la grande Pareï : le Gasparou |
30/07/13 | 5 | randonnée | lac de la Portette- quelque part dans le vallon sous le refuge de presset par le col de Charbonnière |
31/07/13 | 5 | escalade | Pierra Menta : arête N |
01/08/13 | 6 | escalade | Aiguille de la Nova : Pilier Sud occidental |
02/08/13 | 7 | randonnée | traversée S-N du col de la Nova |
03/08/13 | 8 | escalade | Aiguille du lac : Lancelot |
04/08/13 | 9 | randonnée | Col du Grand Fond- les Chapieux |
05/08/13 | 10 | escalade | Séloge : Père et Fils |
06/08/13 | 11 | randonnée | Ville des Glaciers- par le col du Four |
Randonnée et escalade au Beaufortain
Comment raconter cette aventure de manière non chronologique, non topographique, non soporifique ? …
Je vais commencer par raconter les six fois où j’ai faillir mourir. Cela devrait sûrement éveiller les curiosités, susciter les envies et créer la compassion.
D’abord, il y a eu ce second soir, ce second bivouac. Le ciel était gris, les nuages s’amoncelaient au-dessus de nos têtes.
Chouchou a planté deux bâtons de rando, étendu le sur-toit d’une tente par-dessus, et planté 6 sardines sur les côtés.
J’ai ajouté des pierres par-dessus pour empêcher le vent d’entrer, et nous avons abrité le matériel d’escalade dessous.
On s’est couché dehors, il ne pleuvait pas (encore). Nous étions au lac de la Portette, à 2400m. C’était haut, je ne voulais pas avoir d’orage.
Il y a eu de l’orage.
Le premier coup de tonnerre a retenti alors que nous étions endormis. Les autres ont suivi et je comptais les secondes pour savoir s’il se rapprochait. Il s’éloignait. Je commençais à me rendormir quand, d’une part la pluie est devenue trop forte, (même pour mon tout nouveau sur-sac) et d’autre part, l’orage était sur nous. On a rampé jusqu’à la toile, et il s’est rendormi. Au bout d’un moment, voyant la pluie s’adoucir, je suis ressortie. J’ai dû m’endormir un peu, avant de sentir mon duvet se rafraichir et s’humidifier.
Le sur-sac n’est pas infaillible, l’eau avait fini par traverser et s’infiltrer. Je rampai de nouveau dans la boue, les cheveux collés au visage, les pieds congelés, jusqu’à cogner sur chouchou qui se réveilla en sursaut. Le tonnerre reprit de plus belle, et je me rappelle avoir pensé que si je devais mourir foudroyée là maintenant, ça m’éviterait au moins d’avoir à démêler mes cheveux. Je serrais néanmoins très fort la main de l’Être aimé, et à force d’avoir peur, je fus fatiguée d’avoir peur, et je finis par m’endormir aussi.
Ce fut mon premier flirt avec la mort (Le premier du séjour, pas le premier de ma vie…).
Le lendemain, avec l’espoir du soleil qui se lève, puis qui se couche, nous sommes restés confinés dans nos duvets, trempés, collés, immobilisés, à croire à la fin de la pluie chaque fois qu’elle faiblissait. Elle nous a laissé de répit seulement le temps de faire chauffer l’eau pour une soupe (un minestrone). On pourrait dire que cette journée alitée et sous-alimentée est aussi un rapprochement avec la mort…
Quand enfin nous avons pu nous glisser hors de l’abri, quand enfin nous avons pu nous aérer, quand enfin nous avons pu manger, quand enfin nous avons pu sécher, nous fûmes prêts pour une nouvelle voie de bord du lac.
Je passe sur l’approche en vire herbeuse abrupte, glissante, s’érodant sur l’équipement et l’encordement au bord du vide, pour arriver directement à mon tour de grimpe, sur la seconde longueur. Déjà, le toit me regardait d’en haut, avec un air de :
« haha, je te fais peur !! ».
Finalement, on le contourne par la gauche, donc ce n’est pas le plus difficile. Il y a plus loin des pas un peu hasardeux, et au fur et à mesure de l’avancée et des virages, la corde me tire fortement vers le bas. Mes chaussons me font déjà mal, et je dois me faire violence pour soulever mon corps et la tonne de corde qui y est reliée. Enfin, alors que ma dernière dégaine repose 10 mètres plus bas, j’aperçois une espèce de corniche, genre repère d’aigle, au-dessus de laquelle pendent des cordelettes. Je suis enfin au relais ! Après de longues minutes, je suis installée, prête à assurer, et je fais monter mon binôme. Et, alors qu’il a fait la moitié du parcours, je sens mon âme prête à quitter mon corps.
Le sang quitte mon visage, mes membres tremblent, mes mains se crispent, ma tête tourne, la nausée me prend.
Refusant de lâcher ma bile de son côté, je regarde comment je pourrais procéder pour n’arroser personne tout en prenant compte de la longueur de vache dont je dispose. En même temps, je me rassure en disant que mon reverso est auto-bloquant, et que si je venais à perdre connaissance, il ne pourrait pas mourir. Je pense ensuite à ma soeur qui a accouché sans péridurale, et je me concentre sur ma respiration, tout en continuant à avaler la corde méthodiquement.
Enfin, les tremblements cessent, le coeur reprend un battement plus normal, et voilà l’ami qui apparaît. Il ne s’est pas encore vaché que je dis:
« il faut que l’on redescende ».
Sécurité avant tout, il ne cherche pas à discuter, il dit :
« ok, je m’occupe de tout »
, et il s’occupe de tout.
Ce fut mon second flirt avec la mort (ou plutôt avec la chute dans les pommes).
Quelques jours plus tard, je suis sur l’aiguille de la Nova. Il y a le vide tout autour de nous, j’ai posé une dégaine il y a une demi-heure de cela, je me suis agrippée à des pierres branlantes et des gravillons pour me hisser sur une vire pentue, et maintenant, je ne sais pas où aller, je ne sais pas combien de corde il me reste, je ne sais pas ce que chouchou ferait à ma place, alors je décide de faire ce qui me semble le plus sage, je fais mon relais sur deux becquets et je le fais monter.
Même pas effrayé pour deux sous, il s’engage plus en avant sur l’aiguille, et je l’entends de loin me crier qu’il a trouvé une nouvelle plaquette. Il y a donc maintenant du fer et de la vis entre nous, le spectre de la mort s’est éloigné. Ouf. Finalement, il arrive en bout de corde, et je me dévache pour qu’il puisse atteindre un autre spit. Je le rejoins et la marche sur l’arête me confirme que je ne repars pas en tête dans ce paysage de désolation lunaire, aux spits égarés.
La sortie du cratère parait proche et accessible, mais je refuse de me réjouir et de relâcher la tension avant d’être sortie. Quand je le rejoins, il faut encore désescalader une dalle lisse et deux fois penchée pour enfin atteindre le rappel. Et voilà, je peux sourire.
Je retire mes chaussons, et je me réjouis à l’idée de notre succulent dîner (semoule à l’huile d’olive et au sel). Erreur.
Le dîner est une lumière au bout d’un très très long tunnel qu’il me faut encore traverser… Après le premier rappel, normal, il y a un second rappel dans de la paroi qui part en morceau, et qu’il faut quitter pour s’accrocher à un câble, 10 mètres derrière. Il faut ensuite escalader, dés-escalader, re-escalader, assuré au minimum, attaché simplement par le noeud et le corps de son coéquipier, 50m plus loin.
Ensuite, il y a, d’après le topo « une désescalade facile » avant de retrouver le plancher des vaches. Je suis en moulinette et je ne trouve rien de facile. Après avoir crié qu’on allait tous (ie, nous deux) mourir ici, je le vois descendre et trouver le passage. Quant au plancher des vaches, il n’est pas plat du tout, ce sont des ardoises qui sortent de la terre humide, cassantes et fragiles. Rien ne tient, tout glisse, tout penche vers le bas, vers le précipice. Dix heures après avoir posé le premier point, enfin, nous sommes de retour sur l’herbe des moutons.
Ce fut mon troisième flirt avec la mort.
Après cette journée de grimpe intense, ouf, journée de rando. Au moins, on a constamment du sol solide sous les pieds, et à part l’orage ou une attaque de bouquetins enragés, il ne peut rien nous arriver. On ne va quand même pas revenir d’où l’on vient en passant par le refuge de la Balme, non, on va faire une boucle, comme un randonneur qui se respecte, et franchir le col de la Nova. Au début, tout va bien. La neige nous joue un peu des tours (et des détours), mais on finit par se retrouver droit dans l’axe. Ca monte et ça glisse. Mais jusque là, ça va encore.
Arrivés en haut, il y a du vent. Mais ça va encore. Maintenant, il faut redescendre dans la combe de la Neuva. J’ai déjà crié hier qu’on allait tous mourir, j’ai décidé aujourd’hui de montrer mon courage et ma détermination.
Ma jambe part toute seule devant sans réussir à s’arrêter ? Les graviers, la boue, la suie, les cailloux, ce torrent entraine des blocs trois fois plus gros que moi qui dévalent dans mon dos ? Je balance des tonnes de gravats sur mon guide, seul détenteur de la carte et de la Connaissance ? Qu’importe ! Je reste forte. Mais bientôt, il n’y a plus moyen de jouer aux tapis roulants. Les graviers ont disparu. Il ne reste qu’une pente abrupte, vide de tout, pleine de rien. Impossible que j’avance un pied, je finirais en roulé boulé sur 200m. Que faire, Où aller, Que dire ? « Au secouuuuuuuuuuurs ! »
Il m’offre son bras, il sauve ma vie, et on atteint enfin une zone de névé secourable.
Ce fut mon quatrième flirt avec la mort.
A mon tour, je décidai de sauver des vies, et ramassai tous les papillons que je trouvai engourdis dans la neige. Et
tous les insectes luttant encore pour leur survie au milieu du lac.
Le lendemain, après une nuit totalement au plat, (profitons-en pour le signaler, depuis le lac de la Portette, on dormait toujours un peu penchés…) on part vers le refuge de Presset, pour grimper sur l’aiguille du lac qui le surplombe.
Je ramasse les papillons perdus sur les névés, et on avance tranquillement sous le ciel couvert. Arrivés au col, on décide de traverser à niveau, pour ne pas redescendre au lac et remonter ensuite. On aime bien marcher, mais pas trop quand même. Du coup, on se retrouve (encore) dans des éboulis, et sur un sol qui vit sa vie et se déplace quand on lui demande de nous porter.
C’est alors que je regarde avec horreur mon chouchou dévaler la pente sur quelques mètres avant de réussir à se stabiliser de nouveau. Je m’équipe en tremblant, et je l’assure sous le sur-plomb pour éviter les caillasses qui tombent. Je le rejoins au relais, pas trop rassurée.
Ma longueur est cotée plus dure, et la sienne m’a déjà fait peur, avec sa vire branlante sans point. Je ne dis rien, je le laisse me reprendre sur le pontet, je me dévache, et vais me placer sous mon premier point. Je dois reconnaître qu’il n’est pas bien loin, et je vois même le deuxième au-dessus. Bon. Je m’agrippe quelque part, je monte un pied, et je ne bouge plus. Il me faudrait une marche, ou une bacasse, un truc valeur sûre pour quand on n’est sûr de rien. Je regarde le ciel, toujours gris, je sens le vent, toujours soufflant, je regarde le refuge, loin loin en bas.
Je lève les yeux, le point est toujours là, qui se demande pourquoi je n’avance pas. Il est évident que le truc qui dépasse à côté est une bonne prise avec laquelle je mousquetonnerai sans peine. Mais en fait, ce n’est pas si sûr. Et je ne sais toujours pas où poser mon second pied. Je redescends sur la vire. Je réfléchis sans savoir à quoi, et je retente un nouveau truc. Ça me rajoute quatre mouvements, mais ça m’amène toujours au même. Et je me dis qu’une fois clippé ce point, je devrai aller jusqu’au relais, et ensuite, jusqu’au suivant, puis jusqu’au dernier, tout en haut, et qu’il faudra encore redescendre pour enfin être moins inquiétés par l’orage.
Est-ce bien raisonnable ? Je redescends. Il me dit « si tu veux, on redescend ? ». Mais je ne sais pas ce que je veux. Je ne vais quand même pas me laisser arrêter par un petit mur qui penche dans le mauvais sens ?! Je repars à l’assaut, mais sans grande conviction supplémentaire, je ne vais pas plus haut. Ou à peine. Juste à peine plus pour commencer à avoir peur de la chute. Je redescends. Et là, en larmes, je lui avoue que je n’ai fait de l’escalade que pour le séduire, et qu’en vrai, je préfère la couture et la pétanque.
On redescend, on laisse sur le col un message en cailloux à tata Krok (qu’elle ne verra même pas), on va récupérer nos sacs, et la pluie tombe une fois nos affaires rangées et les gore-tex enfilées.
Finalement, rien de bien méchant, pas d’orage, ni de pluie durable.
Je considère tout de même cette partie comme mon cinquième flirt avec la mort.
Mon sixième flirt avec la mort, ça aurait pu être l’attaque de la horde de chiens enragés au village des glaciers, ou bien ma grimpe super engagée à la grande falaise de Séloge, mais non, je considère que c’est lors de notre dernière nuit à la belle. Nous étions parvenus un peu en amont du lac de la Gittaz, et plusieurs tentes se dressaient déjà le long du ruisseau.
Êtres sauvages et associables, nous préférions dormir loin des autres humains, et nous nous installâmes sur la petite butte boisée. Après m’avoir parlé des loups qui étaient quelque part pas loin de nous, il me souhaita bonne nuit, et s’emmitoufla dans ses couches. Je regardais les étoiles (on en a compté cinq de filantes), je suivais avec délice une chauve-souris au-dessus de nos têtes, elle se gavait sûrement de tous les insectes suceurs de sang qui nous tournaient autour, et j’ouïs un bruit indéterminé.
Je me dis alors qu’il s’agissait sûrement de ces humains en bas, plus loin, d’un de leurs chiens. Mais comme chouchou, que j’ai réveillé, me demande la lampe, je me retourne pour fouiller dans les affaires. A ce moment là, à l’instant même où ma main se pose sur la frontale, la terre se met à trembler, et nous sentons le galop passer à moins d’un mètre de nous (de moi surtout).
Notre lumière ne nous montre rien, mais serrés l’un contre l’autre comme des lapins nous tournons la tête dans tous les sens, les oreilles aux aguets. Lorsque l’on éclaire un côté, on croit entendre du bruit dans l’autre direction et l’on se retourne aussi sec. Je me dis que ça a dû être une biche, un petit chevreuil, un petit être fragile et innocent. En tout cas, certainement pas un loup, il y avait des bruits de sabots. Les loups ne font pas de bruit de sabot.
C’était un pas bien trop lourd pour un chevreuil à la vérité. Alors je me dis que c’était un cerf. « C’était un cerf, je pense », je dis tout haut. « Plutôt un sanglier », il me répond. Horreur, je m’imagine la grosse masse sombre, les défenses luisantes et acérées en avant, je l’imagine tapi dans l’ombre, attendant la fin de l’éclairage pour charger de nouveau, et anéantir ces deux représentants de l’espèce sapiens sapiens. En effet, le bruit précurseur, en y repensant, ressemblait à un grognement de cochon. Mais là, il ne s’agit pas d’un gentil Babe, mais d’un sanglier de 6 tonnes qui a des intrus sur son territoire. « Tu veux dormir ailleurs ? » il me demande. J’avais été pressée de me glisser dans le duvet, heureuse de savoir le repos proche, mais maintenant, plus question de repos.
Je ne vois pas comment je pourrais me rendormir en sachant la forêt grouillante de sangliers. Pour un peu qu’un marcassin vienne jouer près de nous, sa mère nous prendrait pour une menace et nous empalerait sans aucune forme de procès. Hop, on remballe les affaires, on fait un tour de frontale pour vérifier que l’on n’oublie rien, et on dévale la colline dans la nuit, non sans se retourner pour vérifier que les sangliers ne suivent pas. On marche, on marche. Jusqu’à quand ? Jusqu’où ? Sont-ils derrière nous ? Regardent-ils où nous partons ? Sont-ils assoiffés de sang ? Trouverons-nous le repos ? J’ai envie d’un grand feu pour éloigner les bêtes sauvages, j’ai envie d’une tente, d’une maison pour me protéger, j’ai envie d’un chien pour alerter à l’approche du danger.
Mais nous n’avons que nos sacs sur le dos. J’imagine le truc, « Deux grimpeurs randonneurs morts le dernier jour de leur aventure, embrochés par un sanglier ». Voilà la classe quoi… La belle mort, le truc de ouf, le truc extrême…. On trouve un endroit plat et non humide, collés contre le mur d’une masure, moi entre le mur et chouchou, chouchou entre moi et ses bâtons. Après avoir sursauté deux trois fois à la suite d’un bruit de claquement ou d’un bruit du vent, on s’endort profondément.
Ce fut mon sixième flirt avec la mort (et son premier).
Bon, à part ces six passages, il y a eu des moments sympas. Il y a eu l’ascension de la Pierra Menta (même si j’ai eu très peur pour rejoindre le rappel, parce qu’il fallait un peu désescalader et comme j’étais en second et qu’il ne me voyait pas, chouchou a tiré la corde, ce qui a manqué de m’envoyer voler dans le précipice).
Il y a eu les deux premières voies du séjour (même si j’ai eu un passage un peu coton en traversée, où je ne faisais pas
la fière).
Il y a eu les nuits sous les étoiles et aussi les chamois et les bouquetins. Ainsi que la fromagerie de la ville des glaciers et le beaufort dans la semoule du soir. Il y a eu des cascades et ces baignades au lac…
… Également il y a eu le soleil, il y a eu la basket de chouchou presque avalée par le marécage. Il y a eu aussi ce papillon qui est resté sur nous pendant toute notre pause le jour du col de la Croix du Bonhomme, il y a eu le cri des marmottes…
… Puis il y a eu le vol de l’aigle ; il y a eu des sauts de grenouilles ; il y a eu ce passage dans la roche creusée ; et bien sûr, partout, tout le temps il y a eu ces paysages de montagne…
Conclusion de cette session escalade au Beaufortain
Pourquoi y aller ?
Pourquoi aller risquer sa vie sur ces parois dangereuses et ces sols mouvants ? Sur ces terres hostiles et habitées par d’étranges créatures ?
Déjà, faut-il y aller ?!
A cette question, je répondrais oui. Oui, même si j’ai cru ma fin imminente plus d’une fois, je recommande cette région, son fromage, et nos voies. D’une part, parce que vous n’êtes sûrement pas aussi chochotte que moi, et que si vous aimez la montagne, vous en acceptez les dangers à la base. Et d’autre part, parce qu’en toute objectivité, nous avions choisi les voies les plus simples et assez équipées pour ne pas avoir à transporter de coinceurs.
Voilà pour le danger.
Ensuite, il y a ce bonheur d’être tout seuls (ou presque) dans la montagne. De dormir à même le sol, avec les étoiles pour seul plafond. Même si notre itinéraire n’offre pas foule de zones plates pour bivouac, on a toujours trouvé où poser nos sacs.
L’alternance rando-grimpe permet de s’avancer la veille jusqu’au pied de la falaise. Cela permet de se reposer de l’ascension en marchant tranquillement le lendemain. Mais également de visualiser plusieurs jours à l’avance, cette grande pointe qui dépasse et que l’on va gravir. Mais pour les grimpeurs purs, les ascensions sont possibles avec une à deux heures de marche d’approche, et pour les randonneurs purs, le Tour du Mont Blanc passe dans ces zones là.
Matériel utilisé en randonnée et escalade au Beaufortain
Matériel d’escalade au beaufortain
CATÉGORIE | NOM DU MODÈLE | MARQUE | POURQUOI AVOIR FAIT LE CHOIX DE CE MODÈLE AU DÉPART | EST CE QUE CE CHOIX A RÉPONDU À CETTE EXPÉRIENCE RACONTÉ DANS CE RTRIP ESCALADE AU BEAUFORTAIN | SI C’ÉTAIT À REFAIRE |
BAUDRIER | hirundos | PETZL | poids | oui | j’enléverais les caritool, inutiles si on n’a pas de matos de TA ou de glace |
BAUDRIER | supernova lady | CAMP | morphologie | oui | à refaire |
DÉGAINE | spirit express longue | PETZL | taille | oui | je changerais pour les FLY WEIGHT SET DEGAINE de chez climbing technology, plus longues,plus légères et moins chères |
DÉGAINE | nimble set degaine | CLIMBING TECHNOLOGY | prix, poids | sangles un peu courtes | je changerais pour les FLY WEIGHT SET DEGAINE de chez climbing technology, plus longues |
CORDE | pro force | MILLET | 2*50m | oui | à refaire |
CHAUSSONS | katana | LA SPORTIVA | confort | non, les velcros s’ouvrent tout seuls | je prendrais un modèle à lacet, ou un modèle à velcro qui tiennent |
CHAUSSONS | talon g2 | EVOLV | technicité | oui mais trop technique etpas assez de confort | des chaussons plus confort pour la grande voie |
CASQUE | meteor iii | PETZL | poids | oui | à refaire |
CASQUE | xenon | SALEWA | poids, parce que je l’avais déjà un | non, ce casque protège assez mal car il bouge sur la tête et devient désagréaable si on le serre suffisament pour ne pas qu’il bouge | un autre casque |
Matériel de rando
SAC | rox climb | CAMP | volume et poids à vide, ce sac a été pris pour parcourir les voies d’escalade à la journée | un peu juste en volume pour emporter tout le nécessaire pour 2 à la journée en grande voie, mais très confortable pour grimper | un sac de volume légèrement supérieur et presque aussi léger pour avoir le matos pour 2 tranquille |
SAC | altapack 65 | GOSPORT | volume | oui mais ce sac manque de confort quand il est très chargé(20kg) prendre un sac plus haut de gamme pour avoir un plus grand confort | prendre un sac plus haut de gamme pour avoir un plus grand confort |
SAC | skyline 45 | LOWE ALPINE | volume poids confort | oui mais manque un emplacement pour mettre les bouteilles sur les côtés | à refaire |
BATONS TÉLÉSCOPIQUES | mont blanc | GABEL | prix, système de repliage résistant dans la durée | oui | à refaire |
BATONS TÉLÉSCOPIQUES | trail trekking pole | BLACK DIAMOND | système de repliage résistant dans la durée | oui | à refaire |
RÉCHAUD | twister | CAMPING GAZ | prix, encombrement, multiples cartouches possibles | oui | à refaire |
CHAUSSURES DE RANDONNÉE | ws mtn trainer | SALEWA | étanche, adaptée au terrain technique | oui | à refaire |
CHAUSSURES DE RANDONNÉE | cyclone | TECHNICA | polyvalente et confortable | oui | à refaire |
Vêtements et bivouac
SOFTSHELL | ? | GEO NORWAY | prix(environ 100€) encombrement | Non car la qualité des fermetures zips est assez faible et le poids est élevé | Prendre une soft shell plus technique ou un gore tex… |
GORE TEX | swift | MILLET | Léger et coupe vent | oi | à refaire |
DUVET | mirage | VALANDRE | chaud et léger | oui | à refaire |
DUVET | dreamer | MILLET | léger | oui, mais nécessité de s’habiller en plus dans le duvet si on dort haut en altitude | à refaire |
SURSAC | QUECHUA EN NOVADRY | assez étanche, sursac utilisé depuis quelques années pour les bivouacs hivernaux, ou seuil | oui même si il est assez lourd (600g) | à refaire, à moins de prendre les sursacs en gore tex haut de gamme d’aujourd’hui | |
SURSAC | bivy bag | MILLET | léger | non car pas assez étanche pour se passer d’un tarp | prendre un plus étanche |
TAPIS DE SOL | THERMAREST | léger et confortable | oui | à refaire | |
TAPIS DESOL | THERMAREST | polyvalent, léger et confortable | oui | à refaire | |
SYSTÈME D’ASSURAGE | reverso 4 | PETZL | polyvalent | oui | à refaire |
SYSTÈME D’ASSURAGE | reverso 2 | PETZL | polyvalent | oui, mais il est un peu trop usé et commence à abîmer les cordes | à changer pour un neuf |